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"De l'esprit communautaire et communiste à l'étatisme fragile: le drame de l'ex-post-Yougoslavie" (Catholica ~ Hiver 1997-1998, Nr. 93)

Lorsque l'on analyse un pays éclectique comme l'ex-Yougoslavie, on est tenté d'utiliser une méthode éclectique. En 1991, un concours de circonstances diverses et convergentes a provoqué l'éclatement du pays, prélude à la guerre entre les principaux acteurs : Serbes, Croates et Musulmans bosniaques. Lors de l'agression grande-serbe menée par l'armée yougoslave contre la Croatie, et plus tard, lors de la guerre interethnique en Bosnie-Herzégovine, et après les Accords de Dayton, dont l'architecte fut le gouvernement américain en 1995, une multitude d'analyses sur l'origine du conflit ont vu le jour. Les crimes perpétrés par les ex-belligérants ont été décrits et décriés par les médias aux quatre coins du monde. On débat toujours dans les chancelleries occidentales sur le futur scénario militaire et juridique qui s'imposera dans les Balkans, notamment dans le nouveau petit Etat multiethnique de Bosnie-Herzégovine.

Alors que de nombreux comptes rendus médiatiques existent sur les instigateurs du conflit et leur rôle pendant le drame de l'ex-Yougoslavie, peu de choses ont été dues de la perception que chaque groupe ethnique a de lui même et de l'Autre, ainsi que de sa propre conception de l'Etat-nation.1 De plus, dans les milieux diplomatiques et médiatiques, on a relativement peu analysé l'héritage du titisme et l'impact de l'esprit totalitaire qui ont considérablement prolongé la durée de la guerre, et qui subsistent toujours dans les structures mentales de la population post-yougoslave. Dans les nouveaux Etats établis sur les ruines de l'ex-Yougoslavie, les classes politiques aiment utiliser des slogans occidentaux, comme le « marché libre », la « démocratie parlementaire », « l'Etat de droit », etc., bien que, sous ce vernis rhétorique, aucune mutation profonde de la culture politique n'ait eu lieu. Les vieilles habitudes philo-communistes, communautaires, voire clientélistes, ont toujours le dessus.

Dans la perspective internationale, l'éclatement de la Yougoslavie communiste soulève maintenant des questions délicates quant au fonctionnement du multiculturalisme en Europe occidentale et de son moteur principal, l'Union européenne. Dans quelle mesure la convivialité passée entre Serbes et Croates fut-elle réelle ou fictive ? L'Union européenne était-elle, pendant la guerre en ex-Yougoslavie, «balkanisée» à un tel point qu'elle ne pouvait pas trouver une réponse rapide et consensuelle parmi ses Etats membres, et empêcher la guerre de prendre la tournure désastreuse que l'ex-Yougoslavie a subie ? Force est de constater que la guerre en ex-Yougoslavie se prête à des analyses différentes, surtout au départ de disciplines différentes : anthropologie, sociologie, psychologie et droit international. Et chaque discipline, bien entendu, conduit à des conclusions différentes. Suite à un cortège de violence jamais vu en Europe depuis 1945, les pays de la post-Yougoslavie risquent de mettre en cause l'idéologie du mondialisme et du multiculturalisme de l'Union européenne. Celle-ci serait-elle capable d'endiguer l'implosion intra-ethnique, si cette implosion a jamais lieu quelque part ailleurs en Europe ? Sans nul doute, une guerre entre le Danemark et l’Allemagne fédérale au sujet de la région frontalière du Schleswig-Holstein, ou une guerre entre l'Allemagne fédérale et la France au sujet de l'Alsace, relève du fantasme politique. Par contre, une guerre larvée et intercommunautaire entre bandes turques vivant en Allemagne et bandes de jeunes Allemands de souche, avec des retombées juridiques dans toute l'Europe, ne relève plus d'un scénario de science fiction.2

A propos de la guerre en ex-Yougoslavie, on peut d'ores et déjà conclure : des conflits similaires, quoique sous une autre forme juridique, risquent de se produire ailleurs en Europe, soit au niveau interethnique soit au niveau intra-ethnique.

L'héritage du titisme a joué un rôle important dans le conflit ex-yougoslave. Donc, une deuxième hypothèse de travail s'impose, à savoir que la guerre en ex-Yougoslavie n'était pas seulement menée par les anciennes élites communistes de Croatie, Slovénie, Serbie et Bosnie-Herzégovine, mais également par les citoyens yougoslaves « communisés », avec leurs liens tribaux et communautaires distincts, tellement typiques pour les pays des Balkans. Il demeure que les peuples, dans la péninsule balkanique, ont été historiquement marqués par un sens faible de l'ethnocentricité par rapport à l'Europe occidentale où le sens de l'étatisme reste assez fort. En fait, au sein de chaque groupe ethnique dans les Balkans, on aperçoit des liens communautaires clos, souvent antagonistes à l'égard d'une autre communauté voisine du même groupe ethnique. Le sens de l'Etat-nation, accepté comme normal par les citoyens dans les pays occidentaux, l'attachement au terroir délimité, et l'affiliation religieuse précèdent toute notion d'Etat-nation.3 Au cours du conflit précédent, il n'était pas insolite d'observer en Bosnie-Herzégovine des combats entre Croates catholiques et Serbes chrétiens-orthodoxes, les deux protagonistes utilisant leur religion respective non dans des intentions théologiques, mais avant tout comme vecteur politico-culturel mettant davantage en relief leurs différences réciproques et donnant une plus-value à la haine de l'Autre - bien qu'aux yeux des observateurs étrangers Serbes et Croates présentent de frappantes similarités anthropologiques et linguistiques.

Certes, au début du conflit, pour beaucoup de citoyens croates, surtout ceux qui vivent dans une Croatie plus ou moins ethniquement homogène, la guerre fut vécue comme une agression serbo-communiste. Mais comment expliquer le conflit en Bosnie-Herzégovine, où les clivages communautaires au sein des trois groupes ethniques sont tellement prononcés, au point d'aboutir souvent à d'étranges alliance supra et intra-communautaires avec d'autres communautés au sein d'autres groupes ethniques ? L'esprit de l'enracinement local, à savoir le « patriotisme local », précède souvent toute identité nationale en quête d'Etat. Ainsi, la guerre en Bosnie donna souvent naissance à des alliances bizarres, notamment quand les Serbes de la région croate occupée, connue sous le nom de « Krajina », avaient pris la partie des Musulmans rebelles du nord-ouest de la Bosnie limitrophe, qui s’opposait ouvertement au gouvernement plus « urbain » bosno-musulman de Sarajevo. Pendant les accrochages violents entre Croates et Musulmans au sud de la Bosnie, notamment dans la région limitrophe de l'Herzégovine, et aux alentours de la ville de Mostar, les Serbes « louaient » leurs services militaires aux Musulmans bosniaques assiégés par les Croates, tout en pilonnant en même temps la ville de Sarajevo, site du gouvernement bosniaque-musulman.4

Pour essayer de comprendre à fond le drame post-yougoslave, on ne saurait oublier l'héritage du titisme. Rappelons que le communisme dans toute l'Europe orientale fut imposé en 1945 par les chars russes. Seule la Yougoslavie titiste a engendré un phénomène communiste sui generis, imposé et façonné par les titistes vainqueurs reste faible. A l'exception des peuples slovènes et croates, qui font partie de l'hémisphère occidental, le reste de la population ex-yougoslave continue à vivre dans des structures sociales, où le bon voisinage, (« komsiluk ») de la deuxième guerre mondiale. Après la rupture avec Staline en 1948, et avant son propre éclatement en 1991, la Yougoslavie de Tito se targuait d'être le pays communiste le plus libéral au monde. Le maréchal Tito avait bien réussi à tenir les peuples disparates sous une férule unitaire non seulement par la poigne totalitaire, mais également en dressant les nationalistes de chaque groupe ethnique contre les autres groupes ethniques avoisinants, et en punissant tour à tour les dissidents de chaque république fédérée. Il est peu probable que son laboratoire multiculturel ait pu survivre sans son habile tactique de « diviser pour régner ».5 Par ailleurs, Tito jouissait du soutien real-politique des chancelleries occidentales qui avaient leurs propres intérêts géopolitiques dans la région, et qui ne voulaient nullement voir la Yougoslavie disparaître de la face du monde. En se fiant à sa propre langue de bois du « socialisme à visage humain », en ouvrant les frontières yougoslaves pour se débarrasser de dissidents potentiels, Tito devint rapidement objet dune véritable admiration dans les milieux intellectuels européens. On ne fit que peu mention, même après sa mort, de la répression en Yougoslavie communiste et post-titiste qui n'a pourtant pas eu de cesse. Dans les dernières années da sa vie surréelle, la Yougoslavie disposait d'un vaste réseau de police secrète (l'UDBA) à l'étranger, qui opérait par ses filières de journalistes et de diplomates dans les milieux d'émigrés yougoslaves, surtout parmi les Croates exilés. Même pendant la « perestroïka » gorbatchévienne, la Yougoslavie battait les records en prisonniers politiques, dont le nombre s'élevait à huit cents personnes, en majorité des Albanais et des Croates de Bosnie. Or la gloire médiatique acquise par le titisme grâce à son idée d'autogestion en économie, couplée, en outre, aux crédits des financiers occidentaux, et suivie par sept millions de ressortissants yougoslaves munis de passeports, faisait croire que la Yougoslavie était bel et bien un modèle socialiste valable dont les lendemains chanteraient.6

Afin de démythifier l'aberration géopolitique et la fiction juridique que fut l'ex-Yougoslavie, qui devait tôt ou tard mener à la guerre que l'on a connue, il convient de se pencher sur le profil du mental yougo-titiste. Quarante-cinq ans d'expérimentations sociales, allant de l'autogestion au non-alignement tous azimuts en politique étrangère, ont créé un manque d'initiative, un mental d'assisté et un effacement d'identité nationale chez de nombreux citoyens yougoslaves. Tito avait failli créer un climat de tolérance et acheminer les intellectuels croates et serbes vers un dialogue franc. En manipulant par ses hagiographes la mémoire historique des Serbes et des Croates, il n'a fait que renforcer les ressentiments de tous contre tous. Force est de constater que l'historiographie officielle de l'ex-Yougoslavie était fondée sur des chiffres douteux exagérant davantage la victimologie partisane-communiste, tout en démonisant chaque aspect de l'identité nationale des peuples constitutifs de la Yougoslavie. Ainsi les deux peuples pivots de l'ex-Yougoslavie, les Serbes et les Croates, avaient des raisons supplémentaires de se soupçonner du favoritisme titiste. De plus, la victimologie titiste officielle s'accommodait mal avec les récits nationalistes des Serbes et des Croates où chaque peuple s'estimait victime de l'Autre et où chacun voyait dans l'Autre l'incarnation du mal. Les Croates avaient tendance à voir les Serbes comme des " barbares " et des " tsiganes " larvés : en revanche, les Serbes, qui étaient représentés dans l'appareil administratif yougoslave dune manière disproportionnée, voyaient dans chaque manifestation croate le spectre de « l'oustachisme » et du « fascisme croate » appuyé par les papistes du Vatican. La spirale de la violence physique qui avait vu le jour après l'éclatement du pays en 1991, ne fut donc qu'une logique du pire qui avait connu ses premières manifestations dans les années titistes.7

La guerre s'est terminée en ex-Yougoslavie, mais le mental yougoslave de l'homo balcanicus est bel et bien vivant, ce qui rend encore plus difficile tout pronostic pour l'avenir des nouveaux pays de la région. Certes, en tant qu'idéologie est mort. Pourtant, on n'observe aucun changement dans les mœurs politiques et sociales, ni dans la nouvelle classe politique, ni chez les citoyens désabusés. A l'instar des autres pays postcommunistes, les nouvelles élites programmatrice, le communisme titiste politiques et leurs concitoyens souffrent d'un manque d'identité et dune grande peur face à l'avenir libéral. L'homo sovieticus est toujours là avec son homologue, l'homo balcanicus, et tous deux se portent bien, quoiqu'ayant recours, cette fois-ci, à une nouvelle langue de bois, en l'occurrence celle empruntée à l'idéologie du globalisme et du mondialisme ambiant. Bref, en dépit de la débâcle du communisme, l'héritage psychologique de la pensée unique communiste, bien que recouvert d'une piètre imitation du démocratisme occidental, règne en force dans toute Europe postcommuniste. Dans les pays post-yougoslaves, après la guerre dont les retombées juridiques et psychologiques commencent à se faire sentir, on témoigne aujourd'hui d'un esprit paléo-totalitaire, à savoir d'une résurgence de la « yougo-nostalgie » pour le bon vieux temps. Et pourquoi pas ? L'économie communiste planifiée garantissait paradoxalement une paresse facile et une sécurité psychologique, ce qui n’est pas aujourd'hui le cas avec le darwinisme économique du système libéral.8 Si l'on ajoute au mental titiste le vide idéologique qui règne dans toute l'Europe occidentale et qui s'accompagne de la mondialisation capitaliste, on ne saurait exclure des troubles sociaux autrement plus graves que ceux auxquels on a assisté jusqu'ici. Certes, le nouveau discours « politically correct », adopté par l'ancienne intelligentsia pro-yougoslave en Occident, a cessé d'emprunter aux slogans titistes et soixante-huitards ; c'est le sabir antiraciste, I'apologie d'une tolérance mondialiste qu'on prêche maintenant aux citoyens post-yougoslaves. En l'occurrence chaque faux pas d'une petite nation « post-versaillaise », comme la Croatie, se solde vite par une condamnation médiatique renvoyant au référent éternel du « fascisme oustachiste ».9 Alors que le système yougo-communiste a, paradoxalement, réussi à renforcer les liens communautaires dans les différentes couches sociales en ex-Yougoslavie, le globalisme est en train de les détruire plus démocratiquement, et sans laisser de traces de sang.

Toute démocratie parlementaire, comme les citoyens occidentaux le savent fort bien, exige la tolérance de l'Autre. Mais comment réconcilier les gens des ex-pays communistes, notamment de l'ex-Yougoslavie dont un grand nombre a collaboré avec le communisme, et dont un autre grand nombre a été persécuté pour ses idées nationalistes ou antiyougoslaves par ceux qui réalisent aujourd'hui leur recyclage politique et par ceux-là mêmes qui exercent aujourd'hui un pouvoir politique non négligeable ? Dans le cas de I'ex-Yougoslavie, comment juger les prétendus criminels de guerre ? Parmi ceux qui ont récemment commis des exactions contre les civils bosniaques, ou bien parmi ceux qui ont participé du côté des titistes en 1945 et en 1946, à de vastes nettoyages ethniques contre les Croates, les Hongrois et les Allemands?10 L'ironie de l'histoire veut que même au Tribunal international de La Haye, on rencontre quelques Serbes et Croates soupçonnés d'avoir commis des crimes de guerre dont les avocats de défense sont d'anciens procureurs et sympathisants titistes.

La guerre récente en ex-Yougoslavie avait fort préoccupé les citoyens dont le souci majeur était de survivre et de conserver leur niveau de vie plus ou moins élevé. On se souciait peu d'apprendre les vertus démocratiques occidentales et de réexaminer la mémoire officielle de la Seconde Guerre mondiale qui avait profondément divisé la population ex-yougoslave. Cela semble vrai pour tous les citoyens de l'Europe postcommuniste, et surtout pour ceux de la post-Yougoslavie dont beaucoup étaient impliqués dans le système totalitaire. Aujourd'hui, on voit se profiler dans les nouveaux Etats post-yougoslaves un mimétisme quasi pathologique par lequel la nouvelle classe politique veut prouver aux Occidentaux qu'elle connaît davantage la démocratie parlementaire que les Occidentaux eux-mêmes, et que son passé obscur peut être supplanté par une surenchère dans le discours démocratique. Or, l'oblitération de la pensée libre due au passé communiste, ne saurait être dissimulée derrière de belles paroles prêchant l'Etat de droit et le marché libre. On ne peut pas installer la démocratie dans les nouveaux pays de la région par un oukase de Bruxelles ou par un décret venu des Etats-Unis.

Pour saisir le drame postcommuniste en ex-post-Yougoslavie, on ne saurait utiliser les paradigmes sociologiques venus d'Occident.11 En raison de la sélection sociobiologique négative que le communisme avait créée en ex-Yougoslavie, une dévastation psychologique totale où le surréel l'a emporté sur le réel a eu lieu bloquant toute circulation des élites capables de gouverner. L'esprit de clan, l'enracinement dans son voisinage proche avait paradoxalement trouvé sa pleine expression dans le système titiste qui fonctionnait à l'époque comme seul vestige contre l'atomisation globaliste et capitaliste. D'où cet appétit aujourd'hui perceptible chez les citoyens post-yougoslaves pour l'homme fort, capable de guider, capable de mimer l'Occident, tout en sauvegardant l'esprit de la communauté originale. I1 serait donc incorrect de blâmer tel ou tel leader post-yougoslave pour telle ou telle dérive autoritaire, comme le font certains journalistes occidentaux. Face au nivellement du marché libre, face au passé communiste, la grande masse des citoyens désabusés ne sait plus à qui se référer, et à quelles idées se fier. Les citoyens de la post-Yougoslavie aiment traditionnellement l'homme fort, quelqu'un qui soit capable de prendre des responsabilités à leur place, et surtout dans un monde vidé de tout sacré. Faute de modèle à l'horizon politique, suite au grand flux dans le cadre de la nouvelle administration politique, on a recours à la vieille duplicité de l’homo sovieticus, tout en recherchant refuge dans ses liens communautaires de bon voisinage (« komsiluk »). De plus, l'impitoyable géographie des Balkans, dont les frontières restent toujours mouvantes en permanence, empêche les gens de s'identifier à toute idée d'un Etat solide. Force est de constater que c'est souvent au hasard et par défaut, qu'on devient Croate, Serbe - et demain, peut-être, un bon Européen...

Notes


  1. Joseph Krulic, « Les Croates, les Musulmans bosniaques, les Serbes et la question de l'Etat-nation, Nations et nationalismes, La Découverte, 1995, pp. 108-113. 

  2. "Zeitbomben in den Vorstädten" [Une bombe à retardement dans la banlieue], Der Spiegel, 14 avril 1997. 

  3. Michael W. Weithmann, Balkan-Chronïk. 2000 Jahre zwischen Orient and Okzident [Chronique sur les Balkans. 2000 ans entre Orient et Occident], Verlag F. Pustet, 1995. 

  4. Xavier Bougarel, Bosnïe ; Anatomie d'un conflit, La Découverte, 1996, p. 63. 

  5. Tomislav Sunic, Titoism and Dissidence; Studies in the History and Dissolution of Communist Yugoslavia, Peter Lang, 1995. 

  6. « Ein Spinnetz totaler Überwachung » [Un réseau de surveillance complet], Der Spiegel, 12 mars 1984. 

  7. Franjo Tudjman, Nationalism in Contemporary Europe, Columbia University Press, 1981, pp. 162-163. Sur l' "historicisme" et les divers mythes antifascistes a yougoslaves, voir Franjo Tudjman, Velike ideje i mali narodi, Matica Hrvatska, 1996, pp. 313-328. 

  8. Claude Polin, Le totalitarisme, PUF, 1982, p. 89. 

  9. A.M. Rosenthal, « Why Wink at Croatian Fascism? » The International Herald Tribune, 16 avril 1997, et ma réponse dans The International Herald Tribune (Letters to the Editor), "Croatia, Then and Now," 18 avril 1997. 

  10. Josef Beer, Weïssbuch der Deutschen aus Jugoslawien. Ortsberichte 1944-1948 [Livre blanc des Allemands de Yougoslavie], Universitas Verlag, 1992. 

  11. Alexander Sinowjew (Zinoviev), Die Diktatur der Logik [La dictature de la logique] Piper Verlag, 1985, p. 148. 

Der Balkankrieg – im Westen missverstanden (den 29 Januar 1994 ~ Frankfurter Allgemeine Zeitung)

Der endlose Krieg in Bosnien und Herzegowina sowie in Teilen des serbisch besetzen Kroatien sollte uns an Moltke erinnern, der am 14. Mai 1890, in der Reichstagssitzung, gesagt hat: „Wenn ein Krieg zum Ausbruch kommt, so ist seine Dauer und sein Ende nicht abzusehen... Es kann siebenjähriger, es kann auch ein dreißigjähriger Krieg werden.” Wer hätte es glauben können, dass die Logik des Krieges in Kroatien, und später auch in Bosnien und Herzegowina, trotz einer Menge internationaler „Sachverständiger“ und „Experten“, immer wieder ein neues Kapitel des Grauens öffnen würde? Die Maastricht-Politiker und die Diplomaten der Vereinten Nationen scheinen so mit komplexen Verhältnissen des mitteleuropäischen und südosteuropäischen Multikultur-Mosaiks überfordert zu sein, so dass das Schlagwort „Balkansyndrom“ oft als ein nettes Alibi für ihr eigenes Nichtstun benutzt wird.


Seltsamerweise gibt es drei Jahre nach dam Zerfall des hybriden Zwangsstaates keine klare Definition der Ursache dieses Krieges, der Motive des Aggressors beziehungsweise Lebensinteressen des Opfers und einer möglichen Losung des Konflikts. Paradoxerweise wandelt sich der Krieg, der 1991 als klassische Aggression Serbiens gegen Kroatien und Slowenien begann, zu einem „Missverständnis-Krieg“, nicht nur zwischen den Kriegsparteien in Bosnien, sondern auch inmitten der Vermittler der Europäischen Gemeinschaft und der Vereinten Nationen. Vielleicht wäre es notwendig, den rechten Staatsrechtler Carl Schmitt zu zitieren oder den linken Exguerrillero Régis Debray zu lesen, um zu verstehen, dass deren wohlmeinender juristischer Formalismus wenig zur raschen Beendigung des Krieges beigetragen hat. Die selbst verursachte Paralyse der Weltvermittler im dauernden Balkanchaos erzeugt natürlich das inoffizielle und weitverbreitete Klischee, dass „alle Seiten in Bosnien und Herzegowina die Verantwortung für den Krieg tagen“ – seinen es die einstigen Opfer, Kroaten und Muslime, seien es die einstigen Aggressoren, die Serben. Doch manche Einzelheiten bedürfen eines größeren methodologischen Kontextes, um diese endlose Tragödie im Herzen Europas zu verstehen, besonders heute, nach der neuesten Vereinbarung Serbiens und Kroatiens in Genf über eine mögliche zwischenstaatliche Anerkennung.


Auf der einen Seite drängten internationale Vermittler und manche westliche Meinungsmacher Kroatien und dessen Oberhaupt Dr. Franjo Tudjman zu endlosen Verhandlungen mit dem Serben Slobodan Milosevic. Auf der anderen Seite verdächtigen immer wieder manche Politiker und Meinungsmacher Tudjman wegen seiner angeblichen geheimen Vereinbarung mit Milosevic auf Kosten der bosnischen Muslime. Die Aufteilung Bosniens und der Herzegowina zwischen Kroatien und Serbien war nicht im geopolitischen Interesse Kroatiens. Wäre dies der Wunsch der kroatischen Regierung gewesen; hätte Kroatien nie als erstes Land der Welt die Souveränität Bosnien und der Herzegowina anerkannt. Hätte Kroatien die Herzegowina annektiert, wäre der serbische Eroberungsappetit in Bosnien und in den angrenzenden serbisch besetzten Gebieten Kroatiens such auf eine gewisse Weise legitimiert worden. Es sollte ein Anliegen der Vermittler der Europäischen Gemeinschaft sowie der Vereinten Nationen sein, das künftige Staatsgefüge Bosnien und Herzegowina zu präzisieren – so schnell wie möglich. Es ist eine Ironie, dass jede neue Resolution der Vereinten Nationen völkerrechtlich die vorhergehende Resolution aufzuheben scheint.


Auf dem Terrain der Tagespolitik suchen jetzt die einstigen Opfer des Krieges in Bosnien beziehungsweise die bosnischen Muslime einen Ersatz für ihre durch die Serben verursachten territorialen Verluste. Da die internationale Gemeinschaft vor zwei Jahren nicht imstande war, die serbischen Aggression einzudämmen und den Krieg zu stoppen, wenden sich jetzt die Muslimkämpfer gegen ihre einstigen kroatischen Helfer und Verbündeten. Zweifellos ist es für die Muslime viel leichter, relativ wenige bosnische Kroaten zu bekämpfen, als die zahlreichen und gut befestigten serbischen Stellungen in Bosnien zurückzuerobern. Die Kroatien in Bosnien und der Herzegowina haben 40 Prozent der Gebiete verloren, in denen sie seit hundert Jahren gewohnt haben. Seltsamerweise haben Massaker an kroatischen Zivilisten in den bosnischen Ortschaften Kiseljak, Maljine, Doljani, Uzdol, Krizancevo, und so weiter, die von muslimischen Militärverbänden verübt wurden, kein großes Echo in der Welt heraufbeschworen.


Um die surreale Situation in Bosnien zu verstehen, sollte man sich auch vor Augen halten, dass Kroatien heute mehr als 150 000 muslimische Flüchtlinge aus Bosnien versorgt und beherbergt, deren männliche Angehörige aller Wahrscheinlichkeit nach gegen Kroaten in Bosnien kämpfen – ganz zu schweigen von der halben Million aus serbisch besetzten Gebieten vertriebenen Kroaten, für die gesorgt werden muss. Was sollte Kroatien eigentlich tun angesichts der Bosnien-Frage, Flüchtlingsfrage und nicht zuletzt der sogenannten Krajina-Frage? Seit drei Jahren wiederholt Präsident Tudjman, dass der Krieg ausschließlich mit friedlichen Mitteln und mit Hilfe der Vermittler der Vereinten Nationen und der Europäischen Gemeinschaft beendet werden soll. Für seinen guten Willen und seine Kooperationsbereitschaft erntete Kroatien Vorwürfe und Kriminalisierungen. Sollte es auf das falsche Pferd gesetzt haben, als es sein Anliegen der demokratischen Selbstbestimmung dem Westen anvertraute?

Professor Dr. Tomislav Sunic
Informationsabteilung des Außenministeriums, Zagreb, Kroatien

La logique du pire dans les Balkans ( 07.03.1994 ~ Tribune Libre Le Journal de Montréal )

L’interminable guerre en Bosnie-Herzégovine et dans les régions de Croatie occupées par les Serbes voit actuellement se multiplier des souffrances affreuses. En même temps, la situation devient de plus en plus confuse, voire totalement incompréhensible, pour les observateurs extérieurs. Trois ans après l’éclatement violent de l’état hybride yougoslave, les organisations internationales ne semblent être d’accord ni sure les causes du conflit, ni sur les motifs de l’agresseur, ni sur les intérêts des victimes. Le formalisme juridique de l’ONU et les volte-face des médiateurs ajoutent encore à cette obscurité. Finalement, l’idée se répand que « toutes les parties sont responsables » du conflit, qu’il s’agisse des victimes ou de leurs agresseurs. On serait tenté de citer le juriste allemand Carl Schmitt, ou les travaux de Régis Debray pour comprendre pourquoi l’indécision de la classe politique européenne n’a pas contribué à la résolution rapide du conflit. Cette interprétation pessimiste du conflit nécessite au moins de mettre quelques détails en perspective, surtout après la récente déclaration de Genève sur une éventuelle reconnaissance mutuelle entre la Serbie et la Croatie. D’un côté, maints médiateurs internationaux, ainsi que quelques journalistes mal informés, exigent que le président croate Franjo Tudjman se livre à d’interminables tête à tête avec son homologue serbe, Slobodan Milosevic. De l’autre, maints politiciens et journalistes soupçonnent en même temps Tudjman d’utiliser ses rencontres avec Milosevic pour « comploter » secrètement contre les musulmans bosniaques. Le partage de la Bosnie-Herzégovine entre la Serbie et la Croatie n’a jamais été dans les intérêts géopolitiques de la Croatie. Si la Croatie avait voulu le dépeçage de la Bosnie-Herzégovine, elle n’aurait jamais été le premier pays dans le monde à avoir reconnu la souveraineté de ce pays. De plus, l’annexion des régions de la Herzégovine peuplées par une majorité de Croates n’aurait pas manqué de légitimer du même coup les appétits serbes dans les régions occupées de Croatie. C’est donc à l’ONU et à la CEE de définir leur rôle et de préciser aussi vite que possible les structures étatiques de la Bosnie-Herzégovine future. Or, l’ironie macabre de ce conflit veut que jusqu'à présent, chaque nouvelle résolution prise par l’ONU du point de vue du droit international ait annulé la précédente. Sur le terrain, les premières victimes de la guerre en Bosnie-Herzégovine, à savoir les musulmans bosniaques, cherchent aujourd’hui un ersatz de territoire pour compenser celui qui a été conquis par les envahisseurs serbes. Vu que la communauté internationale à peu fait pour endiguer l’agression serbe, les musulmans se retournent donc logiquement contre leurs anciens alliés croates. Il leur est en effet beaucoup plus facile de combattre les faibles positions croates en Bosnie centrale, que de recapture leurs positions conquises par les Serbes. Ceux qui doivent en payer les frais sont encore une fois les Croates bosniaques qui ont déjà perdu au cours de la dernière année 40% de leur territoire au profit des milices musulmanes. Les massacres de civils croates qui furent perpétrés par les milices musulmanes dans les villages croates Doljani, Krizancevo, Maljine et Uzdol, échappent curieusement à l’œil des divers medias étrangers. Pour saisir le caractère surréel de la situation en Bosnie-Herzégovine, on pourrait faire remarquer que la Croatie se charge actuellement de plus de 150 000 réfugiés musulmans bosniaques, lointains cousins de ceux qui combattent les Croates bosniaques ! Faut-il par ailleurs rappeler que la Croatie doit également s’occuper d’un demi-million de réfugiés croates chassées de leur foyer par les agresseurs serbes ? Que peut donc faire la Croatie à elle seule ? Depuis trois ans, le président Franjo Tudjman ne cesse de répéter que la guerre en Croatie et en Bosnie-Herzégovine doit être résolue par les moyes pacifiques et avec l’aide de l’ONU et de la CEE. En raison de volonté de coopération, la Croatie n’a pas manqué d’être l’objet de critiques diverses. Stigmatisée autrefois comme pays « fascinant », elle risque aujourd’hui d’être cataloguée comme pais « antimusulmans ». A-t-elle donc misé sur le mauvais cheval quand elle a confié ses aspirations démocratiques à l’Occident ?

Tomislav Sunic
Ministère des Affaires étrangères
Département de la Culture
Zagreb, Croatie

Späte Einsicht in Serbien (14. August 1992, Nr. 187 / Seite 57 ~ Neue Zürcher Zeitung Freitag)

Die Demonstrationen der serbischen Intellektuellen und Oppositionsparteien gegen Slobodan Milosevic, so lobenswert sie sein mögen, kommen leider zu spät. Die serbische Akademie der Kunst und Wissenschaft, die heute die Proteste anführt, hat eine sehr fragwürdige Geschichte. Die Akademie hat 1986 ein Memorandum entworfen, in dem die bekannten serbischen Akademiker die Schaffung Groß-Serbiens sowie die „ethnische Reinigung“ Kosovos empfahlen. Die serbische orthodoxe Kirche hat trotz ihrer neugefundenen Protesthaltung jahrzehntelang Stillschweigen und ein niedriges Profil vorgezogen. Sie hat nie die Repression gegen die Kosovo-Albaner verurteilt, und letztes Jahr hat sie mit keinem einzigen Wort die Invasion der jugoslawischen Armee in Kroatien kritisiert. Auch prominente serbische Intellektuelle waren fast alle stumm, als die jugoslawische Armee Dubrovnik bombardierte und Vukovar dem Erdboden gleichmachte. Der Wunsch der serbischen politischen und intellektuellen Klasse, alle serbischbesiedelten Gebiete in den Nachbarrepubliken Groß-Serbien einzuverleiben, kann gegenteilige Konsequenzen auch für die Serben haben. Wenn Serbien konsequent seine eigenen territorialen Ansprüche juridisch und historisch legitimieren will, sollte es auch Kosovo an Albanien, sowie einen Teil der Vojvodina an Ungarn übergeben. Mit ihrem Wahnwunsch, Groß-Serbien zu errichten, könnten alle Serben leicht in Klein-Serbien landen. Der Fall Jugoslawien weigt, dass die Multikulturutopien, wo immer sie sein mögen, nur mit Gewalt entstehen und bestehen können. Vielleicht lernt Amerika nach den Ereignissen in Los Angeles, das die Pathologie Jugoslawiens auch im eigenen Hause lauern kann. Vielleicht lernen das multikulturelle Marseille und Berlin etwas vom Kriege in Bosnien und Herzegowina.

Tomislav Sunic (Huntingdon, USA)

The Fear of More Terrible Conflicts in the Balkans (21 September 1993 ~ The Guardian)

Some members of the international community, along with some foreign media representatives, have recently criticised Croatia for its alleged mistreatment of Bosnian Muslims. Several details need to be put into perspective in order to comprehend this never-ending Balkan drama: 1. Croatia was the first country in Europe to recognise the sovereignty of Bosnia-Herzegovina. Given the important geopolitical position of this neighbouring state, it is in the paramount interest of Croatia to respect the integrity of Bosnia-Herzegovina. In fact, it is Mr. Izetbegovic, not the Croats, who has just recently signed the de facto partition of Bosnia and Herzegovina in his agreement with the Serb side. On her part, Croatia has also strongly urged all Bosnian Croat military units to allow free safe passage to all United Nations humanitarian convoys. 2. On the one hand of the international community, along with some journalists, is constantly pushing Croatia’s President Franjo Tudjman to endlessly negotiate with Serbia’s leader Slobodan Milosevic: on the other, it accuses Tudjman of setting secret deals with Milosevic. The carve-up of Bosnia-Herzegovina into three distinct and separate states is not in the security interest of Croatia, given that the disappearance of Bosnia-Herzegovina would automatically legitimise Serbian territorial appetites and Serb illicit territorial acquisitions in neighbouring Croatia. 3. And in whose interest is it to keep this terrible conflict going on in neighbouring Bosnia? Contrary to many false assumptions, the Muslim side and its leader, President Alija Izetbegovic, are not so keen to see the conflict come to an end. The Muslim side must recompense its earlier territorial losses to the Serb aggressor by making now impossible demands to the much weaker Bosnian Croats. Ironically, instead of turning their anger on the real Serbian military threat, Bosnia’s Muslims prefer taking on Bosnia’s Croats, while at the same time portraying themselves as the only hapless victims in the Balkan conflict. As a grotesque irony of this conflict, neighbouring Croatia is currently housing more than 170,000 Muslim refugees from Bosnia-Herzegovina, whose number has recently increased by over 50,000 Croats fleeing the Muslim military advances in central Bosnia-Herzegovina. 4. Apparently, many well-meaning European Community observers, as well as many foreign journalists, do not face insurmountable difficulties visiting Muslim areas and prisoners under Croatian control in southern Bosnia-Herzegovina, including the Croatian-held town of Mostar. Yet, they appear unable to make their way to over 150,000 Croats in central Bosnia, who have been encircled and shelled for several months by the Bosnian Muslim forces. 5. The Serb-held territories in Croatia are nominally under the UN jurisdiction. Yet the UN forces seldom attempt to stop the Serbian fighters from shelling nearby Croat towns and villages. Aside from dispensing much needed humanitarian aid, the UN forces in the Serb-occupied regions of Croatia should start finally implementing the numerous UN resolutions, and help the Croat government restore its full sovereignty within its internationally recognised borders. The Croatian government is doing its utmost to bring the bloody and complex Balkan conflict to an end. Yet, without strong and more forceful measures on the part of the UN and the EC, the conflict will only spread throughout the Balkans. To accuse the Croatian government of being equally responsible for this drama is an elegant to shrug off the UN and EC paralysis and failure to define the real aggressor. Instead of dealing with symptoms of the Balkan disease, the international community must first and foremost define the origin and cause of the disease, and treat the disease accordingly. Should they continue to fail, the stage will soon be set for more terrible conflicts to occur.

Tomislav Sunic
Foreign Media Advisor
Ministry of Foreign Affairs
Croatia

Croatia’s Role in Bosnia-Herzegovina (July 27, 1992 ~ The Christian Science Monitor)

Your editorial, "Croatia’s Sellout," July 10, seemed t o have been prompted more by your desire for evenhandedness than by the desire to objectively analyze the war in Bosnia-Herzegovina. Unlike Serbia, Croatia recognized the sovereignty, independence, and inviolability of Bosnia-Herzegovina. In contrast to Serbian Army offensive actions in Bosnia, Croat troops are conducting defensive actions. The Bosnian government has repeatedly asked for international help. Consequently the republic of Croatia has lent support to refugees in Croatia. Does anybody expect Croats in Bosnia-Herzegovina to preach pacifism – only to be routed and slaughtered, and later to be bewailed by vicarious United Nations world-improvers? Last year, when the Yugoslav Army attacked Croatia, Croats learned that the best way their new state can obtain recognition and deal with the aggressor is through military resistance. The decision by the Croats in Herzegovina to set up their own administrative region within Herzegovina must be put in perspective. This decision by no means suggests that Croats are carving up Bosnian territory. There has been no "secret" deal between Serbia and Croatia – as Serbian continuous shelling of Croat towns both in Herzegovina and Croatia demonstrates. By contrast, not a single town in Serbia has so far been attacked by Croat troops.

Tomislav Sunic, Ph.D. Huntingdon, Pa. Professor of Political Science Juniata College

For Yugoslavia, Breakup is the Best Answer (Saturday, 2 March 1991/ The New York Times)

To the Editor:

News reports reflecting the Bush Administration position may lead some to the conclusion that the unity of Yugoslavia needs to be preserved at all costs. Several arguments speak to the contrary. The issue of a federal Yugoslavia versus a confederal Yugoslavia, as put forward by Serbia and Croatia, respectively, is of an academic, but not a substantive nature. Had Serbia abided by the federal principles, many of today’s problems could have been avoided. Instead, federalism died in Yugoslavia in the early 1980’s when Serbia dismantled the autonomy of Kosovo province and declared martial law against ethnic Albanians. Nor did Serbia’s actions tame further ethnic passions; rather, they exacerbated nationalist demands in other parts of Yugoslavia. A parallel could be drawn with certain Soviet republics that, threatened by federal authority, automatically increased their claims for more autonomy. Given the already high proportion of Serbs in the diplomatic corps and the army, Serbian insistence on the preservation of a federal Yugoslavia will continue to be seen as a fig leaf for Serbian supremacy. Part of the problem lies in the decades of intransigence by the Yugoslav federal leadership to accommodate the initially modest demands of Croats, Albanians and Slovenes for a more equitable representation on the federal level. It would be unwarranted to assume that Croats or Slovenes have been bent on seceding from Yugoslavia all along. The often-heard argument among Western observers, including State Department officials, that independent Croatia or Slovenia would have no economic basis for survival as independent states misses the essential point. Rather than wondering whether Croatia and Slovenia can survive alone, one needs to ponder whether any Yugoslavia can continue to exist as a single state. A serious commitment on the part of all republics to restructuring Yugoslavia along confederal lines had, until recently, a chance of success. Today this option is no longer possible. Each confederation plan presupposes friendly relations among its ethnic constituents, not armed threats against one another. With all Yugoslav republics having voted Communism out of power – with the single exception of Communist Serbia – one wonders what is the point in keeping Yugoslavia together? The timely dissolution of Yugoslavia now appears the only solution to civil war. Those who placed high hopes in the Yugoslav experiment need to realize that the peaceful departure of its feuding peoples is far preferable to the violent imposition of military rule and the subjugation of one republic by another.

Tomislav Sunic, Assistant Professor, Political Science, Juniata College, Huntington, Pa., Feb. 10, 1991.

Link to the original article.

Les bourreaux nationalistes des Balkans (Jeudi 30 Juillet 1992 ~ Le Monde)

Les récentes manifestations politiques et intellectuelles de l’opposition serbe à Belgrade, dirigées contre le président Slobodan Milosevic, sont fort louables, mais elles viennent un peu tard. L’Académie serbe des sciences et des arts, présentée comme l’un des principaux initiateurs de ces manifestations, a un passé peu glorieux. En 1986, ne rédigeait-elle pas le célèbre « mémorandum » dont les signataires appelaient à la création de la « Grande Serbie » et à la « purification ethnique » du Kosovo ? L’Eglise orthodoxe serbe, également désignée comme force de résistance, a longtemps tenu le profil bas. L’a-t-on entendue condamner la répression anti-albanaise au Kosovo ou les premières agressions militaires de l’armée « yougoslave » contre la Croatie ? Quant aux intellectuels serbes, ils n’étaient guère nombreux à élever la voix lorsque les villes de Dubrovnik et de Vukovar agonisaient sous les bombes. La volonté d’agréger à la Grande Serbie les régions à minorité serbe des Républiques voisines aura n’en doutons pas, des conséquences néfastes pour la Serbie elle-même. Aujourd’hui la plus forte, elle laisse libre cours à ses appétits territoriaux. Mais demain, si le sort des armes lui est défavorable, qui empêchera les Albanais de réclamer le Kosovo ou les Hongrois d’annexer les territoires à forte population magyare ? à terme, la Grande Serbie que les politiciens serbes bâtissent dans le sang des peuples voisins pourrait bien devenir la Petite Serbie. Quant aux responsabilités des carnages de Bosnie-Herzégovine, que l’on tente d’attribuer au seul Slobodan Milosevic, elles sont pour le moins partagées. Le dictateur serbe n’est jamais que le produit d’une époque, produit fabriqué à Washington et à Paris autant qu’à Belgrade. Les gouvernements américain et français, en défendant naïvement – ou cyniquement – « l’unité et l’intégrité » yougoslaves (que leurs propres diplomaties avaient créées ex nihilo en 1919), on laisse s’envenimer la situation. Le proverbial « Slobo » n’est pas le seul bourreau des Balkans : aujourd’hui et depuis fort longtemps, des dizaines de petits « slobos » ont mis en place, politiquement et intellectuellement, l’engrenage de la violence.

Tomislav Sunic est professeur de sciences politiques au Juniata College de Huntington, en Pennsylvanie (Etats-Unis).

Menaces d’éclatement en Yougoslavie (le 2 Aout 1991 ~ Le Monde Diplomatique)

M. Tomislav Sunic, professeur de science politique au Juniata College, Pennsylvanie (Etats-Unis), nous écrit a propos de notre dossier « L’éclatement de la Fédération yougoslave est-il inéluctable ? », paru dans notre numéro de mai :

Face à une situation géopolitique fort imprévisible, il n’est pas étonnant que les gouvernements occidentaux préfèrent miser sur une Yougoslavie unifiée et intacte, bien que cela ait abouti – histoire à l’épreuve – à davantage de haine entre ses divers groupes ethniques. La Yougoslavie “forte et démocratique aux frontières inviolables”, comme on le laisse entendre à Bruxelles et à Paris, s’inscrit dans une logique jacobine secondée aujourd’hui par le nébuleux concept de global democracy cher a M. George Bush. Or la démocratie dans un pays multiethnique, en l’occurrence la Yougoslavie, ne veut pas dire grand chose. Dans un pays à composantes ethniques diverses, les droits des peoples prennent souvent le dessus sur les droits de l’homme, de même que les nationalismes sont souvent perçus comme le seul véritable moyen de conquérir la liberté. Pour un Serbe, se définir comme « yougoslave » signifie préserver la Serbie « piémontaise » dans une Yougoslavie centralisée, alors que pour un Croate le seule Yougoslavie acceptable ne saurait être qu’une alliance d’Etats indépendants. Tout compte fait, il ne s’agit plus d’un choix entre une Yougoslavie autoritaire et une Yougoslavie démocratique, mais plutôt entre la Yougoslavie et sa dissolution. La démocratisation de la Yougoslavie est en même temps le début de sa fin. Si dans le futur, faute de trouver une formule satisfaisante pour résoudre le problème de la poudrière balkanique, le Conseil de l’Europe devait avaliser la dissolution de la Yougoslavie et l’émergence à sa place de petits Etats indépendants, il est fort probable que cela soulèverait en chaîne de lourdes questions sur l’Europe de Versailles, entrainant, par suite, une déchirante révision de l’histoire européenne, l’examen du rôle du « double endiguement » (double containment) américain, etc. Quoi qu’il en soit, l’Europe de 1992 semble être embourbée dans le nombreuses contradictions ; d’une part, sa classe politique ne cesse de prêcher le droit a l’autodétermination pour tous les peuples européens ; d’autre part, elle insiste sur leur intégration rapide par le biais d’une philosophie néolibérale, nivellatrice de différences culturelles.

Naive Policy ( 22 October 1984 ~ The Sacramento Bee)

Your recent article “Soviets gain the upper hand in Yugoslav politics?” (Sept. 28) suggests naively that the crackdown on dissidents in Belgrade is due to the invisible hand of the Soviet Union, although no proofs of Soviet involvement were given by the article. American media portray Yugoslavia as “a liberal Communist country.” Although Amnesty International, based in London, has clearly established that in recent years the human rights violation in Yugoslavia is the worst in East Europe. The silent persecutions of intellectuals, ever since the Communist takeover in 1945, have been sponsored by the gullibility of American media and less direct Soviet involvement. The recent arrests made in Belgrade are just a side effect in view of the brutal pacification of Croatia in 1971, and the reign of terror against the Albanian minority in Kosovo Province. Since 1981 Kosovo Province has been under a state of siege, where no foreign journalists are allowed to travel. The massacre of Albanian students which left over 100 people dead passed completely unnoticed in the American media. The hypocrisy of the present administration is in the fact that it sees red only in the case of the Soviet Union. Meanwhile, Communist Yugoslavia is extolled as a “liberal country” opposing the Russian bear. Reagan should remember that Pol Pot’s Cambodia, Enver Hoxa’s Albania, and Tito’s Yugoslavia constitute a gang of “non-aligners,” yet all of them capable of legalizing Gulag practices in their own scenario. The massive American financial help to Communist Yugoslavia and the persistent eulogizing of Tito’s murderous practices clearly show that the administration’s primary concern is not anti-communism, but simply the sellout of Yugoslavia in the spirit of the Yalta agreement. By its awkward and cynical attitude toward the issue of Eastern Europe the present administration loses the respect and the hope of those having firsthand knowledge of Communism.