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A QUAND LA DÉCADENCE FINALE ? DE SALLUSTE ET JUVÉNAL À NOS JOURS, Terre et Peuple (Publié le 26 mars 2019)

Les Anciens, c’est à dire nos ancêtres gréco-germano-gallo-slavo-illyro-romains, étaient fort conscients des causes héréditaires de la décadence quoiqu’ils attribuassent à cette notion des noms fort variés. La notion de décadence, ainsi que sa réalité existent depuis toujours alors que sa dénomination actuelle ne s’implante solidement dans la langue française qu’au XVIIIème siècle, dans les écrits de Montesquieu.1 Plus tard, vers la fin du XIXème siècle, les poètes dits « décadents », en France, étaient même bien vus et bien lus dans les milieux littéraires traditionalistes, ceux que l’on désigne aujourd’hui, de façon commode, comme les milieux « d’extrême droite ». Par la suite, ces poètes et écrivains décadents du XIXème siècle nous ont beaucoup marqué, malgré leur mœurs souvent débridées, métissées, alcoolisées et narcotisées, c’est-à-dire malgré leur train de vie décadent.2

En Allemagne, vers la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, bien que moins régulièrement qu’en France, le terme « Dekadenz » était également en usage dans la prose des écrivains réactionnaires et conservateurs qu’effrayaient le climat de déchéance morale et la corruption capitaliste dans la vie culturelle et politique de leur pays. Il faut souligner néanmoins que le mot allemand « Dekadenz », qui est de provenance française, a une signification différente dans la langue allemande, langue qui préfère utiliser son propre trésor lexical et dont, par conséquent, les signifiants correspondent souvent à un autre signification. Le bon équivalent conceptuel, en allemand, du mot français décadence serait le très unique terme allemand « Entartung », terme qui se traduit en français et en anglais par le lourd terme d’essence biologique de « dégénérescence » et « degeneracy », termes qui ne correspondent pas tout à fait à la notion originale d’ « Entartung » en langue allemande. Le terme allemand « Entartung », dont l’étymologie et le sens furent à l’origine neutres, désigne le procès de dé-naturalisation, ce qui n’a pas forcément partie liée à la dégénérescence biologique. Ce mot allemand, vu son usage fréquent sous le Troisième Reich devait subir, suite à la fin de la Deuxième Guerre mondiale et suite à la propagande alliée anti-allemande, un glissement sémantique très négatif de sorte qu’on ne l’utilise plus dans le monde de la culture et de la politique de l’Allemagne contemporaine.3

En Europe orientale et communiste, durant la Guerre froide, le terme de décadence n’a presque jamais été utilisé d’une façon positive. À sa place, les commissaires communistes fustigeaient les mœurs capitalistes des Occidentaux en utilisant le terme révolutionnaire et passe-partout, notamment le terme devenu péjoratif (dans le lexique communiste) de « bourgeois ». En résumé, on peut conclure que les usagers les plus réguliers du terme « décadence » ainsi que ses plus farouches critiques sont les écrivains classé à droite ou à l’extrême droite.

On doit ici soulever trois questions essentielles. Quand la décadence se manifeste-t-elle, quelles sont ses origines et comment se termine-t-elle ? Une foule d’écrivains prémodernes et postmodernes, de J.B. Bossuet à Emile Cioran, chacun à sa façon et chacun en recourant à son propre langage, nous ont fourni des récits apocalyptiques sur la décadence qui nous conduit à son tour vers la fin du monde européen. Or force est de constater que l’Europe se porte toujours bel et bien malgré plusieurs décadences que elle a déjà subies à partir de la décadence de l’ancienne Rome jusqu’à celle de nos jours. À moins qu’on ne soit, cette fois-ci, voués – compte tenu du remplacement des peuples européens par des masses de peuplades non-européens – non plus à la fin d’UNE décadence mais à LA décadence finale de notre monde européen tout court.

Avant que l’on commence à se lamenter sur les décadences décrites par nos ancêtres romains et jusque par nos auteurs contemporains, et quelle que soit l’appellation qui leur fut attribuée par les critiques modernes, « nationalistes », « identitaires », « traditionalistes de la droite alternative, » « de la droite extrême » et j’en passe, il est essentiel de mentionner deux écrivains modernes qui signalèrent l’arrivée de la décadence bien que leur approche respective du contenu et des causes de la décadence fut très divergente. Ce sont l’Allemand Oswald Spengler avec son Déclin de l’Occident, écrit au début du XXème siècle, et le Français Arthur de Gobineau avec son gros ouvrage Essai sur l'inégalité des races humaines, écrit soixante ans plut tôt. Tous deux étaient des écrivains d’une grande culture, tous deux partageaient la même vision apocalyptique de l’Europe à venir, tous deux peuvent être appelés des pessimistes culturels avec un sens du tragique fort raffiné. Or pour le premier de ces auteurs, Spengler, la décadence est le résultat du vieillissement biologique naturel de chaque peuple sur terre, vieillissement qui l’amène à un moment historique à sa mort inévitable. Pour le second, Gobineau, la décadence est due à l’affaiblissement de la conscience raciale qui fait qu’un peuple adopte le faux altruisme tout en ouvrant les portes de la cité aux anciens ennemis, c’est-à-dire aux Autres d’une d’autre race, ce qui le conduit peu à peu à s’adonner au métissage et finalement à accepter sa propre mort. À l’instar de Gobineau, des observations à peu près similaires seront faites par des savants allemands entre les deux guerres. On doit pourtant faire ici une nette distinction entre les causes et les effets de la décadence. Le tedium vitae (fatigue de vivre), la corruption des mœurs, la débauche, l’avarice, ne sont que les effets de la disparation de la conscience raciale et non sa cause. Le mélange des races et le métissage, des termes qui sont mal vus aujourd’hui par le Système et ses serviteurs, étaient désignés par Gobineau par le terme de « dégénérescence ». Selon lui, celle-ci fonctionne dorénavant, comme une machine à broyer le patrimoine génétique des peuples européens. Voici une courte citation de son livre :

Je pense donc que le mot dégénéré, s’appliquant à un peuple, doit signifier et signifie que ce peuple n’a plus la valeur intrinsèque qu’autrefois il possédait, parce qu’il n’a plus dans ses veines le même sang, dont des alliages successifs ont graduellement modifié la valeur ; autrement dit, qu’avec le même nom, il n’a pas conservé la même race que ses fondateurs ; enfin, que l’homme de la décadence, celui qu’on appelle l’homme dégénéré, est un produit différent, au point de vue ethnique, du héros des grandes époques.4

Et plus tard, Gobineau nous résume peut-être en une seule phrase l’intégralité de son œuvre : « Pour tout dire et sans rien outrer, presque tout ce que la Rome impériale connut de bien sortit d'une source germanique ».5

Ce qui saute aux yeux, c’est que soixante ans plus tard, c’est-à-dire au début du XXème siècle, l’Allemand Oswald Spengler, connu comme grand théoricien de la décadence, ne cite nulle part dans son œuvre le nom d’Arthur de Gobineau, malgré de nombreuses citations sur la décadence empruntées à d’autres auteurs français.


Nous allons poursuivre nos propos théoriques sur les causes du déclin de la conscience raciale et qui à son tour donne lieu au métissage en tant que le nouveau mode de vie. Avant cela, il nous faut nous pencher sur la notion de décadence chez les écrivains romains Salluste et Juvénal et voir quel fut d’après eux le contexte social menant à la décadence dans l’ancienne Rome.

L’écrivain Salluste est important à plusieurs titres. Primo, il fut le contemporain de la conjuration de Catilina, un noble romain ambitieux qui avec nombre de ses consorts de la noblesse décadente de Rome faillit renverser la république romaine et imposer la dictature. Salluste fut partisan de Jules César qui était devenu le dictateur auto-proclamé de Rome suite aux interminables guerres civiles qui avaient appauvri le fonds génétique de nombreux patriciens romains à Rome.

Par ailleurs Salluste nous laisse des pages précieuses sur une notion du politique fort importante qu’il appelle « metus hostilis » ou « crainte de l’ennemi », notion qui constituait chez les Romains, au cours des guerres contre les Gaulois et Carthaginois au siècle précèdent, la base principale de leur race, de leur vertu, de leur virilité, avec une solide conscience de leur lignage ancestral. Or après s’être débarrassé militairement de « metus Punicus » et de « metus Gallicus », à savoir après avoir écarté tout danger d’invasion extérieure, les Romains, au milieu du IIème siècle avant notre ère, ont vite oublié le pouvoir unificateur et communautaire inspiré par « metus hostilis » ou la « crainte de l’Autre » ce qui s’est vite traduit par la perte de leur mémoire collective et par un goût prononcé pour le métissage avec l’Autre des races non-européennes.

Voici une courte citation de Salluste dans son ouvrage, Catilina, Chapitre 10.

Ces mêmes hommes qui avaient aisément supporté les fatigues, les dangers, les incertitudes, les difficultés, sentirent le poids et la fatigue du repos et de la richesse… L'avidité ruina la bonne foi, la probité, toutes les vertus qu'on désapprit pour les remplacer par l'orgueil, la cruauté, l'impiété, la vénalité.6

La crainte de l’ennemi, la crainte de l’Autre, notion utilisée par Salluste, fut aux XIXème et XXème siècles beaucoup discutée par les historiens, politologues et sociologues européens. Cette notion, lancée par Salluste, peut nous aider aujourd’hui à saisir le mental des migrants non-européens qui s’amassent en Europe ainsi que le mental de nos politiciens qui les y invitent. Certes, la crainte de l’Autre peut être le facteur fortifiant de l’identité raciale chez les Européens de souche. On en est témoin aujourd’hui en observant la renaissance de différents groupes blancs et identitaires en Europe. En revanche, à un moment donné, le metus hostiles, à savoir la crainte des Autres, risque de se transformer en son contraire, à savoir l’amor hostiles, ou l’amour de l’ennemi qui détruit l’identité raciale et culturelle d’un peuple. Ainsi les Occidentaux de souche aujourd’hui risquent-ils de devenir peu à peu victimes du nouveau paysage multiracial où ils sont nés et où ils vivent. Pire, peu à peu ils commencent à s’habituer à la nouvelle composition raciale et finissent même par l’intérioriser comme un fait naturel. Ces mêmes Européens, seulement quelques décennies auparavant, auraient considéré l’idée d’un pareil changement racial et leur altruisme débridé comme surréel et morbide, digne d’être combattu par tous les moyens.

Nul doute que la crainte de l’Autre, qu’elle soit réelle ou factice, resserre les rangs d’un peuple, tout en fortifiant son homogénéité raciale et son identité culturelle. En revanche, il y a un effet négatif de la crainte des autres que l’on pouvait observer dans la Rome impériale et qu’on lit dans les écrits de Juvénal. Le sommet de l’amour des autres, ( l’ amor hostiles) ne se verra que vers la fin du XXème siècle en Europe multiculturelle. Suite à l’opulence matérielle et à la dictature du bien-être, accompagnées par la croyance à la fin de l’histoire véhiculé par les dogmes égalitaristes, on commence en Europe, peu à peu, à s’adapter aux mœurs et aux habitudes des Autres. Autrefois c’étaient Phéniciens, Juifs, Berbères, Numides. Parthes et Maghrébins et autres, combattus à l’époque romaine comme des ennemis héréditaires. Aujourd’hui, face aux nouveaux migrants non-européens l’ancienne peur de l’Autre se manifeste chez les Blancs européens dans le mimétisme de l’altérité négative qui aboutit en règle générale à l’apprentissage du « déni de soi ». Ce déni de soi, on l’observe aujourd’hui dans la classe politique européenne et américaine à la recherche d’un ersatz pour son identité raciale blanche qui est aujourd’hui mal vue. A titre d’exemple cette nouvelle identité négative qu’on observe chez les gouvernants occidentaux modernes se manifeste par un dédoublement imitatif des mœurs des immigrés afro-asiatiques. On est également témoin de l’apprentissage de l’identité négative chez beaucoup de jeunes Blancs en train de mimer différents cultes non-européens. De plus, le renversement de la notion de « metus hostiles » en « amor hostiles » par les gouvernants européens actuels aboutit fatalement à la culture de la pénitence politique. Cette manie nationale-masochiste est surtout visible chez les actuels dirigeants allemands qui se lancent dans de grandes embrassades névrotisées avec des ressortissants afro-asiatiques et musulmans contre lesquels ils avaient mené des guerres meurtrières du VIIIe siècle dans l’Ouest européen et jusqu’au XVIIIe siècle dans l’Est européen.

L’engouement pour l’Autre extra-européen – dont l’image est embellie par les médias et cinémas contemporains – était déjà répandu chez les patriciens romains décadents au Ièr siècle et fut décrit par le satiriste Juvénal. Dans sa IIIème satire, intitulée Les Embarras de Rome (Urbis incommoda), Juvénal décrit la Rome multiculturelle et multiraciale où pour un esprit raffiné comme le sien il était impossible de vivre...

Dans ces flots d’étrangers et pourtant comme rien
Depuis longtemps déjà l’Oronte syrien
Coule au Tibre, et transmet à Rome ses coutumes,
Sa langue, ses chanteurs aux bizarres costumes...7

Juvénal se plaint également des migrants juifs dans ses satires, ce qui lui a valu d’être taxé d’antisémitisme par quelques auteurs contemporains.

Maintenant la forêt et le temple et la source
Sont loués à des Juifs, qui, pour toute ressource,
Ont leur manne d’osier et leur foin de rebut.
Là, chaque arbre est contraint de payer son tribut;
On a chassé la muse, ô Rome abâtardie
Et l’auguste forêt tout entière mendie8

Les lignes de Juvénal sont écrites en hexamètres dactyliques ce qui veut dire en gros un usage d’échanges rythmiques entre syllabes brèves ou longues qui fournissent à chacune de ses satires une tonalité dramatique et théâtrale qui était très à la mode chez les Anciens y compris chez Homère dans ses épopées. À l’hexamètre latin, le traducteur français a substitué les mètres syllabiques rimés qui ont fort bien capturé le sarcasme désabusé de l’original de Juvénal. On est tenté de qualifier Juvénal de Louis Ferdinand Céline de l‘Antiquité. Dans sa fameuse VIème satire, qui s’intitule Les Femmes, Juvénal décrit la prolifération de charlatans venus à Rome d’Asie et d’Orient et qui introduisent dans les mœurs romaines la mode de la zoophilie et de la pédophilie et d’autres vices. Le langage de Juvénal décrivant les perversions sexuelles importées à Rome par des nouveaux venues asiatiques et africains ferait même honte aux producteurs d’Hollywood aujourd’hui. Voici quelques-uns de ses vers traduits en français, de manière soignés car destinés aujourd’hui au grand public :

Car, intrépide enfin, si ton épouse tendre
Voulait sentir son flanc s’élargir et se tendre
Sous le fruit tressaillant d’un adultère amour,
Peut-être un Africain serait ton fils un jour9

Les Romains utilisaient le mot « Aethiopis », Ethiopiens pour désigner les Noirs d’Afrique.

Qui interprète l’interprète ?

L’interprétation de chaque ouvrage par n’importe quel auteur, sur n’importe quel sujet social et à n’importe quelle époque, y compris les vers de l’écrivain latin Juvénal, se fera en fonction des idées politiques dominantes à savoir du Zeitgeist régnant. Or qui va contrôler l’interprète aujourd’hui si on est obligé de suivre les oukases pédagogiques de ses chefs mis en place après la fin de la Deuxième Guerre mondiale ? À cet effet on peut citer Juvénal et les fameux vers de sa VIème satire : « Quis custodet ipsos custodes » à savoir qui va garder les gardiens, c’est à dire qui va contrôler nos architectes de la pensée unique qui sévissent dans les universités et dans les médias ?

A peu près le même principe de censure et d’autocensure règne aujourd’hui au sujet de l’étude et la recherche sur les différentes races. Aujourd’hui, vu le dogme libéralo-communiste du progrès et la conviction que les races ne sont qu’une construction sociale et non un fait biologique et en raison du climat d’auto-censure qui sévit dans la haute éducation et dans les médias, il n’est pas surprenant que de savants qui analysent les différences entre races humaines soient souvent accusés d’utiliser des prétendus « stéréotypes ethniques ». Or le vocable « stéréotype » est devenu aujourd’hui un mot d’ordre chez les bien-pensants et chez les hygiénistes de la parole en Europe. La même procédure d’hygiénisme lexical a lieu lorsqu’un biologiste tente d’expliquer le rôle des différents génomes au sein des différentes races. Un savant généticien, s’il s’aventure à démystifier les idées égalitaires sur la race et l’hérédité risque d’être démonisé comme raciste, fasciste, xénophobe ou suprémaciste blanc. La nouvelle langue de bois utilisée par les médias contre les mal-pensants se propage dans toutes les chancelleries et toutes les universités européennes.

Certes, les idées, en l’occurrence de mauvaises idées, mènent le monde, et non l’inverse. Dans la même veine, les idées dominantes qui sont à la base du Système d’aujourd’hui décident de l’interprétation des découvertes dans les sciences biologiques et non l’inverse. Nous avons récemment vu la chasse aux sorcières dont fut victime le Prix Nobel James Watson, codécouvreur de la structure de l'ADN et du décryptage du génome humain. Il a été attaqué par les grand médias pour des propos prétendument racistes émis il y a une dizaine d’année à propos des Africains. Je le cite : « Même si j'aimerais croire que tous les êtres humains sont dotés d'une intelligence égale, ceux qui ont affaire à des employés noirs ne pensent pas la même chose».10 Ce que Watson a dit est partagé par des milliers de biologistes et généticiens mais pour des raisons que nous avons déjà mentionnées, ils se taisent.

Nos Anciens possédaient un sens très aigu de leur héritage et de leur race qu’ils appelaient genus. Il existe une montagne d’ouvrages qui traitent de la forte conscience de la parenté commune et du lignage commun chez les Anciens. Nous n’allons pas citer tous les innombrables auteurs, notamment les savants allemands de la première moitié du XXème siècle qui ont écrit un tas de livres sur la dégénérescence raciale des Romains et d’autres peuples européens et dont les ouvrages sont non seulement mal vus mais également mal connus par le grand public d’aujourd’hui. Il est à noter qu’avant la Deuxième Guerre mondiale et même un peu plus tard, les savants et les historiens d’Europe et d’Amérique se penchaient sur le facteur racial beaucoup plus souvent et plus librement qu’aujourd’hui.

Il va de soi que les anciens Romains ignoraient le lois mendéliennes de l’hérédité ainsi que les complexités du fonctionnement de l’ADN, mais ils savaient fort bien comment distinguer un barbare venu d’Europe du nord d’un barbare venu d’Afrique. Certains esclaves étaient fort prisés, tels les Germains qui servaient même de garde de corps auprès des empereurs romains. En revanche, certains esclaves venues d’Asie mineure et d’Afrique, étaient mal vus et faisaient l’objet de blagues et de dérisions populaires.

Voici une brève citation de l’historien américain Tenney Frank, tirée de son livre Race Mixture in the Roman Empire ( Mélange des races dans l’Empire de Rome), qui illustre bien ce que les Romains pensaient d’eux-mêmes et des autres. Au début du XXème siècle Frank était souvent cité par les latinistes et il était considéré comme une autorité au sujet de la composition ethnique de l’ancienne Rome. Dans son essai, il opère une classification par races des habitants de l’ancienne Rome suite à ses recherches sur les inscriptions sépulcrales effectuées pendant son séjour à Rome. Voici une petite traduction en français de l’un de ces passages :

.…de loin le plus grand nombre d’esclaves venait de l'Orient, notamment de la Syrie et des provinces de l'Asie Mineure, avec certains venant d’Égypte et d’Afrique (qui, en raison de la classification raciale peuvent être considères comme venant de l'Orient). Certains venaient d’Espagne et de Gaule, mais une proportion considérable d'entre eux étaient originaires de l'Est. Très peu d’esclaves furent recensés dans les provinces alpines et danubiennes, tandis que les Allemands apparaissent rarement, sauf parmi les gardes du corps impériaux. (L’auteur) Bang remarque que les Européens étaient de plus grand service à l'empire en tant que soldats et moins en tant que domestiques.11

Et plus tard il ajoute :

Mais ce qui resta à l’arrière-plan et régit constamment sur toutes ces causes de la désintégration de Rome fut après tout le fait que les gens qui avaient construit Rome ont cédé leur place à un race différente.12

Les anciens Romains avaient une idée claire des différents tribus et peuples venus d’Orient à Rome. Comme l’écrit un autre auteur, « Les esclaves d’Asie mineur et les affranchis cariens, mysiens, phrygiens et cappadociens, à savoir les Orientaux, étaient, par rapport aux esclaves d'autres provinces, particulièrement méprisés dans la conscience romaine. Ces derniers sont même devenus proverbiaux à cause de leur méchanceté. »13

En conclusion, on peut dire qu’une bonne conscience raciale ne signifie pas seulement une bonne connaissance des théories raciales ou pire encore la diffusion des insultes contre les non-Européens. Avoir la conscience raciale signifie tout d’abord avoir une bonne mémoire de la lignée commune et une bonne mémoire du destin commun. Cela a été le cas avec les tribus européennes et les peuples européens depuis la nuit des temps. Une fois l’héritage du peuple, y compris son hérédité, oublié ou compromis, la société commence à se désagréger comme on l’a vu à Rome et comme on le voit chaque jour en Europe aujourd’hui. « Les premiers Romains tenaient à leur lignée avec beaucoup de respect et appliquaient un système de connubium selon lequel ils ne pouvaient se marier qu’au sein de certains stocks approuvés ».14 Inutile de répéter comment on devrait appliquer le devoir de connubium en Europe parmi les jeunes Européens aujourd’hui. Voilà un exemple qui dépasse le cadre de notre discussion. Suite à la propagande hollywoodienne de longue haleine il est devenu à la mode chez de jeunes Blanches et Blancs de se lier avec un Noir ou un métis. Il s’agit rarement d’une question d’amour réciproque mais plutôt d’une mode provenant du renversement des valeurs traditionnelles.

Il est inutile de critiquer les effets du métissage sans en mentionner ses causes. De même on doit d’abord déchiffrer les causes de l’immigration non-européenne avant de critiquer ses effets. Certes, comme if fut déjà souligné la cause de la décadence réside dans l’oubli de la conscience raciale. Or celle-ci avait été soit affaiblie soit supprimée par le christianisme primitif dont les avatars séculiers se manifestent aujourd’hui dans l’idéologie de l’antifascisme et la montée de diverses sectes égalitaristes et mondialistes qui prêchent la fin de l’histoire dans une grande embrassade multiraciale et transsexuel. Critiquer les dogmes chrétiens et leur visions œcuméniques vis-à-vis des immigrés est un sujet autrement plus explosif chez nos amis chrétiens traditionalistes et surtout chez nos amis d’Amérique, le pays où la Bible joue un rôle très important. Or faute de s’en prendre aux causes délétères de l’égalitarisme chrétien on va tourner en rond avec nos propos creux sur le mal libéral ou le mal communiste. On a beau critiquer les « antifas » ou bien le grand capital ou bien les banksters suisses et leurs manœuvres mondialistes. Reste qu’aujourd’hui les plus farouches avocats de l’immigration non-européenne sont l’Église Catholique et ses cardinaux en Allemagne et en Amérique. Roger Pearson, un sociobiologiste anglais de renom l’écrit . « Se répandant d'abord parmi les esclaves et les classes inférieures de l'empire romain, le christianisme a fini par enseigner que tous les hommes étaient égaux aux yeux d'un dieu créateur universel, une idée totalement étrangère à la pensée européenne... Puisque tous les hommes et toutes les femmes étaient les "enfants de Dieu", tous étaient égaux devant leur divin Créateur ! »15

Si l’on veut tracer et combattre les racines de la décadence et ses effets qui se manifestent dans le multiculturalisme et le métissage, il nous faut nous pencher d’une manière critique sur les enseignements du christianisme primitif. Ce que l’on observe dans l’Occident d’aujourd’hui, submergé par des populations non-européennes, est le résultat final et logique de l’idée d’égalitarisme et de globalisme prêchée par le christianisme depuis deux mille ans.

Tomislav Sunic et écrivain, ancien professeur de sciences politiques aux Etats-Unis, ancien diplomate croate. (www.tomsunic.com)


  1. Montesquieu, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (Paris: Librairie Ch. Delagrave : 1891), Ch. IX, p. 85-86, où il cite Bossuet; “Le sénat se remplissait de barbares ; le sang romain se mêlait ; l’amour de la patrie, par lequel Rome s’était élevée au-dessus de tous les peuples du monde, n’était pas naturel à ces citoyens venus de dehors..” http://classiques.uqac.ca/classiques/montesquieu/considerations/Considerations_romains.pdf 

  2. T. Sunic, „Le bon truc; drogue et démocratie“, dans Chroniques des Temps Postmodernes ( Dublin, Paris: éd Avatar, 2014), pp 227-232. En anglais, „The Right Stuff; Drugs and Democracy“, in Postmortem Report; Cultural Examinations from Postmodernity ( London: Arktos, 2017), pp. 61-65. 

  3. Voir T. Sunic, « L'art dans le IIIème Reich », Ecrits de Paris, juillet—août 2002, nr. 645, Also “Art in the Third Reich: 1933-45”, in Postmortem Report ( London: Artkos, 2017) pp. 95-110. 

  4. Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, (Paris: Éditions Pierre Belfond, 1967), Livres 1 à 4, pp. 58-59. 

  5. Ibid, Livres 5 à 6., p. 164. http://ia802900.us.archive.org/27/items/EssaiSurLinegaliteDesRacesHumaines/EssaiSurLinegaliteDesRacesHumaines.pdf 

  6. Salluste, Ouvres de Salluste, Conjuration de Catilina - ( Paris: C.L. F. Pancoucke, 1838), pp 17-18. http://ia802706.us.archive.org/5/items/uvresdesalluste00pancgoog/uvresdesalluste00pancgoog.pdf 

  7. Satires de Juvénal et de Perse, Satire III, traduites en vers français par M. J . Lacroix (Paris : Firmin Didot frères Libraries, 1846), p. 47. 

  8. Ibid. p.43 

  9. Ibid., p.165 Egalement sur le site: http://remacle.org/bloodwolf/satire/juvenal/satire3b.htm 

  10. “ L'homme le plus riche de Russie va rendre à James Watson sa médaille Nobel”, Le Figaro, le 10 Dec. 2014. http://www.lefigaro.fr/international/2014/12/10/01003-20141210ARTFIG00268-l-homme-le-plus-riche-de-russie-va-rendre-a-james-watson-sa-medaille-nobel.php 

  11. Tenney Frank, „Race Mixture in the Roman Empire“, The American Historical Review, Vol. XXI, Nr. 4, July 1916, p. 701. 

  12. Ibid. 705 

  13. Heikki Solin, “Zur Herkunft der römischen Sklaven” www.academia.edu/10087127/Zur_Herkunft_der_r%C3%B6mischen_Sklaven 

  14. Roger Pearson, « Heredity in the History of Western Culture, » The Mankind Quarterly, XXXV. Nr. 3. printemps 1995, p. 233. 

  15. Ibid p. 234. 

La Croatie : du communisme au mondialisme, Réfléchir et Agir (N°48, automne 2014)

Réfléchir et Agir (N°48, automne 2014) http://www.reflechiretagir.com/commande.html

La Croatie : du communisme au mondialisme Suite à diverses données géopolitiques survenues à la fin de la prétendue Guerre Froide et à la sclérose de la mystique trotskiste, maoïste, castriste, titiste chez les scribes occidentaux, l’irruption des temps politiques dans le monde relativement apolitique de l’homo sovieticus n’a pas tardé à se produire dans les pays communistes créés au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Cela fut surtout le cas du pays bric-à-brac nommé la Yougoslavie, dont les peuples constitutifs n’ont pas tardé en 1991 à reprendre leur liberté. Pourtant dans l’optique de l’an 2014, le prix de cette séparation fut fort élevé.

Ce n’est pas une blague du tout que de soutenir la thèse que la naissance de la nouvelle Croatie en 1991 fut due à la politique jacobine menée par le communiste serbe Slobodan Milosevic dont le but était de garder par force divers peuples dans le giron yougoslave à domination serbe. En effet, à part des émigrés croates et quelques proscrits anticommunistes dans la République fédérale socialiste de Croatie, peu de Croates avant 1991 songeaient à la création d'un État séparé. Il fallut attendre le méchant Autre, en l’occurrence la menace de la Grande Serbie pour se lancer dans l’aventure sécessionniste. À des rares exceptions près, la naissance de la nouvelle Croatie, en 1991, ne fut que la réponse réactive des anciens apparatchiks croates au prétendu danger grand-serbe. Faute de mieux, cette année-ci, il était de rigueur de devenir un bon nationaliste croate malgré soi. Le Commissaire et le Marchand Au début des années quatre-vingt-dix du siècle précédent, et à l’instar des autres pays de l’Est communiste, le communisme s'est effondré en Yougoslavie parce que ses idées s’étaient déjà beaucoup mieux réalisées en pratique dans les pays capitalistes de l’Ouest. De nombreuses tentatives précédentes du gouvernement communiste yougoslave – comme l'instauration du dogme égalitaire, la terreur intellectuelle, le langage du politiquement correct, ainsi que la croyance au progrès économique éternel – scandées par un prêchi-prêcha multiculturel sur toutes les longueurs d’onde et auxquelles les anciens titistes et leurs consorts au sein de la gauche divine occidentale avaient autrefois rêvé, avaient déjà été mieux réalisées en Occident capitaliste. Il était donc prévisible que les anciens clercs yougo-communistes de l'ex-République socialiste de Croatie, une fois la mystique internationaliste communiste et titiste essoufflée, n’auraient aucune difficulté à se convertir au mondialisme américanophile et à accepter à bras ouverts l’idéologie du marché libre. D’ailleurs, le même recyclage intellectuel s’était déjà accompli, beaucoup plus tôt, chez les soixante-huitards français et allemands. Que le commissaire puisse devenir marchand s’inscrit dans la règle de circulation des élites. Que l’énergie internationaliste puisse se transformer en énergie nationaliste nous a été démontré à maintes reprises par tous les pays européens au cours du XXe siècle. De plus, l’ancien commissaire, suite à la chute du communisme en Europe orientale et après sa brève aventure anticommuniste et pseudo-nationaliste, n’a pas eu de mal non plus pour se recycler en un bon marchand. Au sein de la nouvelle classe politique en Croatie d’aujourd’hui, les gens les plus fortunés sont les ex-titistes et leur progéniture néolibérale, y compris les anciennes barbouzes issues de l’appareil de sécurité communiste. Bien entendu, le père de la nouvelle Croatie, lui-même ancien titiste, feu le président Franjo Tudjman, lors de l’éclatement de la Yougoslavie en 1991, n’avait point voulu écarter ses anciens compagnons de route. Il en avait besoin pour mettre son projet d’indépendance croate en marche. La guerre qui s’ensuivit fut au fond une guerre orchestrée par les communistes serbes contre les communistes croates, et elle aboutit par la suite à une guerre interethnique. Alors que les nationalistes croates, purs et durs, se portaient volontaires pour le front, les titistes et les Yougoslaves de la nouvelle Croatie avaient prudemment gardé profil bas tout en s’emparent des postes importantes dans le secteur bancaire et dans le nouveau gouvernement croate. La tragédie croate consista dans le fait que les nationalistes croates, en 1991, tombèrent dans le piège : au lieu de diriger leur haine contre les Yougoslaves et les communistes, ils ont fini par se lancer dans une guerre inutile contre les nationalistes serbes. Ceux qui ont en profité, des deux côtés, furent les anciens titistes bien tapis, les anciens membres du Parti communiste yougoslave, ainsi que les anciens bureaucrates de la police secrète yougoslave qui attendaient leur nouvelle heure de gloire.

La Croatie « libérée » Et cette heure n’a pas tardé à venir après la mort de Tudjman en 1999, suivie du cheminement forcené de la Croatie vers l’Union Européenne. Tout compte fait, l’Union Européenne, à savoir la nouvelle « l’Euroslavie », se révéla un carcan mondialiste beaucoup plus efficace que le carcan yougo-communiste. Autant dire que ce nouveau carcan mondialiste « à la yougoslave » fonctionne à heure actuelle à merveille pour la destruction des peuples européens. Le processus d’indépendance croate fut en effet un faux semblant ; un faux semblant bien coûteux en vies pour les nationalistes croates et les nationalistes serbes. Une bonne chose survint toutefois suite à la fin du communisme en Yougoslavie. Les citoyens croates ont découvert le vrai visage du capitalisme mondialiste. Aux temps de la Yougoslavie communiste, le visage sauvage du capitalisme pouvait être dissimulé par les mondialistes derrière l’imaginaire hollywoodien, derrière les éloges du magnifique pouvoir d’achat dans les pays capitalistes et la prétendue liberté de l’Occident par rapport à la morne existence de l’univers communiste. Pour les mondialistes, tant que la menace soviétique (vraie ou hypothétique) planait à l’horizon, il n’y n’avait aucune difficulté à vendre des paroles creuses aux populations communisées de l’Est européen dont les rêves de la liberté se réduisaient souvent à la montée perpétuelle de leur pouvoir d’achat. Aujourd’hui, ce jeu mensonger de cache-cache libéralo-communiste ne fonctionne plus. Le bestiaire capitaliste montre chaque jour sa gueule vorace en Croatie et ailleurs, supprimant le sens de la solidarité nationale et faisant des citoyens croates de grotesques imitateurs de lendemains qui ont, depuis belle lurette, fini de déchanter en Occident. Tout à ce que l’internationalisme communiste a raté, le mondialisme libéral l'a réussi. On observe en Croatie les anciens apparatchiks de l’époque yougo-communiste se décorant, cette fois ci, des symboles capitalistes, et utilisant la nouvelle langue de bois apprise chez leurs camarades bruxellois. En jurisprudence, en haute éducation et surtout dans la diplomatie croate, les anciens commissaires yougos ont abandonné le look militaire pour le vernis de la superclasse mondialiste, tous arborant désormais des brevets de bons et dociles élèves de Bruxelles et de Washington. Même l’entrée de la Croate dans l’UE fut une farce inhérente aux jeux du démocratisme parlementaire, comme ce fut auparavant le cas partout en Europe. Lors du référendum de janvier 2012 pour l’entrée dans l’UE le taux d’abstention en Croatie s’est élevé à 56,46 % et ce n'est qu’une petite couche de la population croate qui a voté « oui » pour l’UE. Si l’on compare ce référendum à celui de 1991, où 85 % de citoyens croates s’étaient déclarés pour la sécession d’avec la Yougoslavie, on voit une fraude démocratique supplémentaire. A la veille dudit référendum pour l’UE, la classe politique, à Bruxelles et à Zagreb, a délibérément abaissé le palier de votes pour rendre le référendum valide, démocratisme parlementaire oblige -- ce qui fut déjà fort bien décrit par le grand savant Carl Schmitt.

Capitalisme, communisme, identité Aujourd'hui, le commissaire communiste ne présente plus aucune menace pour les nationalistes d'Europe dont les préoccupations, à l’heure actuelle, portent davantage sur l’afflux massif d'immigrés non-européens que sur la peur du Goulag. Le problème réside plutôt chez les Commissaires de l’Union Européenne et leur Evangile sur « la libre circulation du capital et de la main d’œuvre ». Au moins la Croatie, comme d’ailleurs tous les pays de l’ancien Est communiste, peut se targuer d’être le pays plus européen que l’Europe de l’Ouest vu le fait que les immigrés non-Européens sont toujours une espèce rare dans le pays. Rétrospectivement, et à la lumière des vagues interminables de l'immigration non-européenne, la question se pose de savoir si le communisme, après tout, était vraiment un danger mortel pour les peuples européens? Il est fort possible que si l’Union Soviétique l'avait emporté sur l’Amérique, avec son hégémonie culturelle, les peuples d 'Europe occidentale auraient sauvegardé leur identité raciale et nationale beaucoup mieux que sous le capitalisme. Ce n’est pas un hasard du tout si en Croatie, comme d’ailleurs dans toute l’Europe de l’Est postcommuniste, la conscience nationale et raciale est aujourd'hui plus affirmée que dans les pays de l'Europe occidentale. Cette forte identité nationale est peut- être due en partie à la terreur communiste d'autrefois qui avait paradoxalement réussi à renforcer les sentiments nationalistes, soudant le sens de la communauté mieux que le Système capitaliste. Ce qui tenait la Yougoslavie communiste en vie était surtout son langage surréel et son historiographie hyperréelle, basée sur le prétendu danger de la bête immonde du fascisme croate toujours aux aguets pour renverser la chère patrie yougoslave. La Yougoslavie communiste ne pouvait pas fonctionner sans l’éternel discours antifasciste et anti-croate. Certes, peu de citoyens yougoslaves croyaient aux balivernes communistes, quoique tout le monde, d’après les règles non-inscrites de l’homo sovieticus, fît semblant d’y croire. Or, ce même langage déformé et ce même imaginaire démonologique utilisés naguère par les scribes yougo-communistes contre leurs opposant nationalistes croates sont devenus aujourd’hui les outils fructueux d'un Système mondialiste qui est à la recherche de ses propres boucs émissaires, en l’occurrence les nationalistes et identitaires français et allemands. Les mêmes signifiants utilisés naguère en Yougoslavie contre les mal pensants sont devenus les nouveaux mythes fondateurs du mondialisme capitaliste. Tomislav Sunic (https://www.tomsunic.com/) est écrivain. Son dernier ouvrage en français, Chroniques des temps postmodernes, vient de sortir à l’édition d’Avatar.

Tomislav Sunić : «L’Union européenne est en train de s’autodétruire»

À l'occasion des élections européennes qui devraient déplacer plus de 380 millions de citoyens du 23 du 25 mai prochain, la revue Éléments a lancé une grande enquête auprès de tous ses (nombreux) correspondants et amis européens sur l'état de l'Union européenne. Premier invité : le Croate Tomislav Sunić. Ancien diplomate, professeur de sciences politiques, traducteur et écrivain, il est l'auteur de La Croatie un pays par défaut ?

Tomislav-Sunic

Tomislav Sunić et son épouse Ksenija (Xenia) Bakran-Sunić, auteur d'un recueil de poèmes «L'ancienne vie est morte/The Old Life is dead»

Éléments : Depuis 2010, les sondages Eurobaromètre montrent invariablement que le pourcentage global des Européens défavorables à l’Union européenne est constamment supérieur à celui des Européens qui lui sont favorables. Les déceptions qu’a engendrées jusqu’ici la construction européenne doivent-elles oui ou non remettre en question l’idéal d’une Europe politiquement unie ? Pourquoi faire l’Europe ?

Tomislav Sunić : L’idée de la construction de l’Union européenne relève d’un pur constructivisme académique, du « wishful thinking » des bien-pensants occidentaux qui fut très à la mode suite à la Deuxième Guerre mondiale. Ce constructivisme européen, « à la yougoslave » ou « à la soviétique », quoique jamais exprimé officiellement, eut comme but d’endiguer la prétendue hégémonie allemande, et par détour, d'accélérer la disparition de tous les peuples européens. Or, les développements de cette construction européenne, depuis le Traité de Rome et, surtout, depuis le Traité de Maastricht, ont rétrospectivement démontré le dilettantisme de ses architectes, ainsi que le caractère surréel et donc fragile de cette construction hyperréelle. L’Union européenne est en train de s’autodétruire.

En quoi le projet européen tel qu’il a été pensé, vous rappelle le constructivisme « yougoslave » ou « soviétique » ?

Tomislav Sunić : Le bric-à-brac de l’état multiculturel qui fut naguère l’ex-Yougoslavie fut un projet sorti ex nihilo de Versailles et de Trianon, voué donc à l’échec dès sa naissance. Le rassemblement forcené et par des oukases belgradois (à la bruxelloise) de peuples divers mena fatalement à la méfiance de tous contre tous. Idem pour l'Union soviétique. Ces deux constructions remontaient au jacobinisme français. L’Union européenne n’est aujourd’hui que le mime des deux exemples yougoslave et soviétique, qui ont déjà donné naissance à tant de haine mutuelle en Europe de l’Est et en Eurasie. L’Union européenne, telle que nous la voyons sur la mappemonde, aura une courte durée. Hélas, le prix sera élevé.

Un an après l’entrée officielle de votre pays au sein de l’Union européenne le 1er juillet 2013, quel est l'état d'esprit des Croates vis-à-vis des institutions européennes ?

Tomislav Sunić : Nul. Le Croate moyen est en train de déchanter. Après la première extase face aux images de l’Occident qui chante tout en versant gratuitement de l’argent aux nouveaux membres de l’UE, on est aujourd’hui témoin d’une vraie métastase institutionnelle en Croatie. Je vous renvoie sur le rapport de Reuters sur la Croatie du 5 mai 2014 (ici (Reuters Croatie)) qui a établi un bon certificat de décès de l’économie croate et son marché du travail. Pour chaque employé on dénombre un retraité (1,2 million d’ouvriers vs 1,2 million de retraités). Le chômage parmi les jeunes croates dépasse celui des Espagnols.

L'Euro étant devenu un sujet majeur de discorde entre les peuples européens, faut-il dissoudre la monnaie unique pour sauver l'Europe ou doit-on défendre bec et ongles l’Euro ?

Tomislav Sunić : L’Euro n’est pas la source des problèmes de l’Union européenne. Ces problèmes sont plutôt la conséquence du mauvais fonctionnement de l’UE. Pourquoi ne pas garder l’euro, à l’instar du dollar, comme moyen de transactions financières transeuropéennes et internationales, tout en gardant les monnaies nationales pour les activités des économies nationales ? Ainsi chaque pays européen serait en mesure de fixer le taux de change de sa monnaie locale en fonction de la hausse ou de la baisse de son PIB.

Doit-on souhaiter la dissolution de l’Union européenne ou préférer cette Europe imparfaite ? Peut-on refonder la construction européenne sur d’autres bases ? Lesquelles ?

Tomislav Sunić : Toute dénomination d’Union européenne, que ce soit sous le nom de « Reich », ou sous le nom d' « Union européenne », ou bien sous n’importe quel autre signifiant est souhaitable, pourvu que son signifié exprime les bases réelles de ses peuples différents, à savoir leurs fonds culturels et spirituels. En l’occurrence, le Saint Empire allemand ou même l’Empire austro-hongrois, vu leur longue durée historique, présentaient davantage de stabilité et de viabilité pour leurs peuples que l’Union européenne actuelle.

Dans la dernière livraison de la revue Éléments, Félix Morés écrit que l’Union européenne a souffert des élargissements aux États d’Europe centrale et orientale qui ont diminué les chances de parvenir à une Union politique. Faut-il plaider pour une Europe à plusieurs vitesses ? À un noyau dur autour d’une Europe des six ?

Tomislav Sunić : La proposition hypothétique d'une « Europe à plusieurs vitesses » s’inscrit dans la logique capitaliste et globalitaire. L’Europe à « deux vitesses » sera donc dès le début vouée à l’échec, ou pire encore aux guerres civiles incessantes. En revanche, une Europe, même une Europe davantage élargie, dont les peuples partagent des idées communes, à savoir le sens de leur identité locale d’une part, et leur rôle commun de grande puissance, de l’autre, peut nous donner encore une chance.

Dans ce cadre, où arrêter les frontières de l'Europe ? Quelle est l'architecture juridique qui privilégiera au mieux, selon vous, le respect des identités locales et le rôle de grande puissance de l'Europe ?

Tomislav Sunić : Ah bon. Où donc ? Dans le 12e arrondissement de Paris ou bien à Kreutzberg, ou à Neukölln, au sud de Berlin ? Ou bien à Marseille ou à Brixton, au sud de Londres ? Il vaut mieux alors que j’aille à Timgad ou à Lahore pour chercher sur les limes d’anciens Européens. Nous tous, qu’on s’appelle identitaires, nationalistes, terriens, tous épris de la glèbe ancestrale, cessons donc avec nos querelles tribales. Les frontières européennes se trouvaient jadis à Troie en Asie donc, chez les Phrygiens, chez Hector, Priam, et la belle Cassandre. Mes ancêtres croates ont dû passer par l’Hindou-Kouch et par le Caucase, il y a quelques millénaires, avant de s’installer sur la belle côte adriatique. Aujourd’hui, on trouve davantage de bons Européens à Buenos Aires ou à Sidney qu’à Paris ou à Londres. Avec nos guerres claniques, que ce soit les Russes contre les Ukrainiens ou les Serbes contre les Croates, on ne fait qu’une belle offrande aux ennemis de l’Europe.

Après la chute et la renaissance du tragique

20 novembre, 2013 | POLÉMIA

source: Polemia 20 novembre, 2013 | POLÉMIA

Intervention de Tomislav Sunic prononcée en langue française à la conférence de Madrid, le 8 novembre 2013, organisée par le Cercle d’Etudes La Emboscadura.

Tomislav Sunic, de nationalité croate, ancien diplomate, ancien professeur de science politique, écrivain et historien, auteur de nombreux ouvrages et articles dont certains ont été présentés par Polémia, livre ses réflexions sur le destin du monde. Contrairement à certains penseurs et auteurs européens, il voit dans le futur un éternel recommencement où l’homme devra poursuivre sa lutte prométhéenne, marquée par le désir de l’exploit, le goût du dépassement et la foi dans la grandeur humaine.

Polémia

Nous pouvons remplacer le substantif « la chute » par d’autres expressions qui possèdent des significations plus chargées, telles que « la fin des temps », la « décadence » ou le « chaos» – ou bien « la fin d’un monde», faute de dire « la fin du monde ». Ces mots et ces expressions me viennent à l’esprit, suivis par de nombreuses images liées à nos identités actuelles ou futures.

J’espère que personne ici ne prétend être un futurologue. Avec le recul, la plupart des futurologues ont été démentis dans leurs pronostics. Rappelons le récent effondrement de l’Union soviétique, phénomène que pas un seul soviétologue américain ou européen n’a pu prévoir.

Ma thèse principale est que les prophéties concernant la chute ne sont aucunement nouvelles. Depuis des temps immémoriaux, nous avons été témoins des histoires, des contes et des mythes qui présageaient le déclin ou la fin des temps. La grande majorité des penseurs et des auteurs européens, de l’Antiquité à la postmodernité, ont abordé dans leurs écrits la notion de la fin des temps et ses conséquences.

L’illusion du progrès

Du côté opposé, nous avons l’optimisme historique et la croyance au progrès. Le progrès est devenu aujourd’hui une religion laïque. Heureusement, il semble montrer des fissures, étant soumis de plus en plus à de nombreuses critiques. La croyance au progrès et ses adeptes ont eu un gros impact au cours de ces derniers 200 ans – et plus particulièrement au cours de ces derniers 70 ans. Les apôtres modernes du progrès portent généralement divers déguisements, soit le costume libéral, soit le costume communiste, et même parfois l’habit chrétien. Un peu péjorativement, on peut appeler ces gens les architectes du meilleur des mondes.

En revanche, ceux parmi nous qui rejettent la religion du progrès et l’optimisme historique peuvent être partagés en deux catégories : les penseurs du tragique et les pessimistes culturels. Les penseurs du tragique croient à la nature cyclique des temps et de l’identité ; ils disent qu’après chaque jour ensoleillé doit venir un jour de pluie. Je me range parmi ceux-ci.

Voici une citation du philosophe Clément Rosset, qui est proche de notre patrimoine intellectuel, étant lui-même le ferme adversaire de l’optimisme historique tout en étant un bon avocat du tragique :

« Il en résulte que toute pensée non tragique est nécessairement pensée intolérante ; que, plus elle s’éloigne des perspectives tragiques, plus elle s’incline vers telle ou telle forme d’ “optimisme”, plus elle se fait cruelle et oppressive » (Logique du pire, p. 155). * Voici ma première remarque : les optimistes historiques, tels que les communistes, les libéraux, et tous ceux qui aspirent à l’amélioration du monde ont une manie invétérée d’imposer à notre société des constructions sociales, ou des contrats sociaux, qui, en règle générale, aboutissent toujours à des cauchemars politiques.

En décrivant « la chute », nous ne pouvons pas faire abstraction des images, des symboles et des mythes liés à la fin du temps. Les images de la chute étaient beaucoup plus fortes chez nos ancêtres qu’elles ne le sont parmi nous aujourd’hui. Il n’est point besoin de chercher loin pour trouver des exemples. Nous n’avons qu’à lire les mythes grecs et les épopées homériques qui regorgent de violence, de luttes titanesques, de chaos, de différents âges et de différentes identités. L’histoire de la célèbre saga germanique, les Nibelungen – dont le message sous-tend inconsciemment l’identité de la plupart des Européens – se termine dans le chaos et le massacre mutuel au sein de la même tribu. Indépendamment de leur héritage racial commun, nos ancêtres européens furent bien conscients de la fragilité de toute identité, y compris de la leur. Après tout, le personnage principal de la saga des Nibelungen, la reine Kriemihilde, cherchant à venger son mari, le héros Siegfried, tué par le héros Hagen, épouse en secondes noces le Hun, l’empereur asiatique Attila. Ils eurent un fils qui était un « Mischling » – un hybride racial, peut-on dire – dont la tête fut finalement coupée par Hagen.

En ce qui concerne la perception de la fin des temps, je voudrais commencer par deux courtes citations de deux auteurs modernes qui font également partie de notre patrimoine intellectuel. Tous les deux étaient très conscients de la fin des temps. Le premier est un homme possédant un sens profond du tragique, et le second un pessimiste historique. Bien que souvent floue, la différence entre le sens du tragique et le pessimisme historique est tout à fait significative.

Voici notre premier penseur du tragique : Ernst Jünger, dans son livre An der Zeitmauer (Au mur du temps) :

« Le destin peut être anticipé, il peut être ressenti, il peut être redoutable, mais il ne doit jamais être connu. Si cela devait se produire, l’homme vivrait une vie d’un prisonnier qui connaît l’heure de son exécution » (p.25). * Ma deuxième remarque : les penseurs tragiques excluent toute relation de cause à effet. Le bon côté du tragique consiste en la croyance aux événements aléatoires et en la croyance au « hasard ». Le penseur tragique n’est jamais tenté de prédire l’avenir. Pourquoi devrions-nous escalader le mur du temps et tenter d’enrayer la chute du temps au-delà du mur du temps ? Ce serait un devoir pénible, car nous y rencontrerions probablement des images effrayantes. Les optimistes historiques, qu’ils soient libéraux ou communistes, avec leur mentalité rationaliste, souhaitent installer exactement un tel schéma prévisible du progrès humain. Nous avons vu les résultats au cours de ces derniers soixante-dix ans !

Contrairement à la personne du tragique, Emile Cioran, en tant que pessimiste historique, ne se soucie guère de son identité à venir. Il a renoncé à toutes sortes de tentatives prométhéennes. Il s’est lui-même extrait, il y a bien longtemps, du temps et en est venu à la conclusion qu’il n’y a aucune raison pour la reprise de n’importe quelle identité. Je ne pense pas que nous devions accepter ce modèle, bien que la plupart d’entre nous, ici, y soient souvent enclins.

« Les autres tombent dans le temps ; je suis, moi, tombé du temps. A l’éternité qui s’érigeait au-dessus de lui succède cette autre qui se place au-dessus, zone stérile où l’on n’éprouve plus qu’un seul désir : réintégrer le temps, s’y élever coûte que coûte, s’en approprier une parcelle pour s’y installer, pour se donner l’illusion d’un chez soi. Mais le temps est clos, mais le temps est hors d’atteinte ; et c’est de l’impossibilité d’y pénétrer qu’est faite cette éternité négative, cette mauvaise éternité » (La Chute dans le Temps, p. 1152). L’Europe: Le mur du temps vis-à-vis du mur de fer

Sur la base de ces citations, nous allons examiner maintenant quelques illusions politiques contemporaines sur la chute dans le temps et sur notre identité, illusions que nous pourrions tout aussi bien qualifier d’autotromperie. Ces illusions peuvent nous aider à acquérir une meilleure perception de notre nouvelle identité. Regardons vers l’arrière, au-delà de notre actuel mur du temps.

En mai 1945, les Américains faisaient une grande la fête sur Broadway, à New York. La Seconde Guerre mondiale venait de prendre fin, et, depuis lors, l’image de cette guerre a été considérée comme le symbole ultime du mal absolu. Nous vivons encore ce scénario de la fin des temps fascistes et antifascistes.

Or, de l’autre côté du mur, en même temps, ou, si l’on peut s’exprimer d’une façon moins allégorique, de l’autre côté de l’Atlantique, le Rideau de fer s’éleva. A la mi-mai 1945, des millions de personnes d’Europe centrale et d’Europe orientale ont connu la chute de leurs temps et également la perte de leur identité. Pour beaucoup d’Européens, cette année marqua la fin des temps européens, « le Ragnarök ». Le mot allemand « Zusammenbruch », était à cette époque très en usage parmi les millions de réfugiés : des millions d’Allemands, de Hongrois, d’Italiens, de Croates, Serbes, Ukrainiens, des soldats et des civils, allaient bientôt être livrés à la fin du temps communiste ou, si l’on peut s’exprimer moins allégoriquement, à la mort certaine. Le temps de la fin avait touché non seulement leurs dirigeants vaincus, mais également des millions d’individus anonymes dont le flux du temps défia tous les instruments.

La race de l’esprit comme nouvelle identité

Lorsqu’on s’interroge sur notre prétendue identité après la chute, y compris le bagage héréditaire qui nous lie à nos confrères blancs à travers le monde, nous devons convenir que l’identité ne peut pas être uniquement ancrée dans notre race. Il y a aussi une autre dimension qui doit être prise en compte : notre sens du tragique et notre mémoire historique.

* Ma troisième remarque. L’Identité, lorsqu’elle repose seulement sur l’hérédité, a peu de sens si elle manque de « Gestalt » – si elle refuse de s’assigner un nom, un prénom et un lieu d’origine. Une abstraite identité blanche, dépourvue d’ « âme raciale», n’a pas de sens. Nous portons tous des noms et nous traînons tous notre mémoire tribale et culturelle.

Ma propre identité, par exemple, ainsi que l’identité de plusieurs de mes et de nos collègues en Allemagne ou en France, ou ailleurs en Europe, est fortement ancrée dans notre mémoire historique. Par exemple, depuis l’âge de cinq ans j’ai été exposé à de longues histoires racontées par mon défunt père sur les massacres communistes qui ont eu lieu à l’été 1945 en Europe centrale et orientale. Ces histoires, à leur tour, ont affecté ma perception de moi-même, ainsi que ma perception de la réalité qui m’entoure.

* Ma quatrième remarque : je tiens à souligner que la victimologie joue un rôle formidable dans la formation des identités de beaucoup de peuples dans le monde entier, y compris de nous-mêmes. Le cas de la victimologie juive, qui est également devenue aujourd’hui une partie de l’identité du monde entier, nous fournit le meilleur exemple et en dit long.

Face à notre approche de la fin des temps, nous avons souvent recours aux identités « négatives ». Des mots tels que « immigration » et « islam» viennent à l’esprit lorsque nous avons recours à ces référents d’identités négatives. Ces mots et notions nous fournissent la preuve d’un changement de paradigme. Par exemple, il y a trente ans, les mots « immigration » et « islam » étaient peu utilisés et n’étaient pas considérés comme un facteur majeur dans les analyses de la chute anticipée. Il y a trente ans, notre identité négative était fondée sur l’anticommunisme, le communisme représentant alors le symbole de la chute et le symbole de la fin des temps.

Or, le communisme, avec son contraire, l’anticommunisme, en tant que facteur de la construction de notre identité négative, est maintenant périmé : il semble avoir disparu de notre vocabulaire, de notre imagination et de notre processus de construction de l’identité négative. A sa place s’installent maintenant les étrangers, les non-Européens, le métissage, la prétendue menace de l’islam et la disparition de l’Etat-Nation dans le système mondial capitaliste.

Il y a cependant de sérieux problèmes avec l’utilisation et l’abus de ces nouvelles notions. Ainsi, le mot « islam », qui est devenu un mot inspirant la crainte à beaucoup d’entre nous, peut désigner à la fois tout et rien. L’islam n’est pas le synonyme d’une identité distincte ou d’une race distincte : c’est une religion universaliste, tout comme la religion universaliste chrétienne. Nous pourrions passer des heures à débattre maintenant et à nous quereller au sujet du christianisme et du patrimoine des Blancs européens. Nous oublions souvent que le christianisme, tout comme l’islam, a ses origines dans les déserts du Moyen-Orient – et non en Europe. Il y a maintenant davantage de chrétiens vivant en dehors de l’Europe qu’en Europe elle-même.


* Ma première conclusion : Sur le plan purement méthodologique, nous devons éviter d’utiliser une approche individualisée et chercher plutôt à comprendre la chute et la notion d’identité du point de vue économique, social, philosophique, racial, religieux et démographique. En nous attardant seulement sur la question de l’hérédité ou de la race, ou sur la question de l’immigration, tout en oubliant les autres aspects qui façonnent notre identité, nous courons le risque de tomber dans un piège réductionniste et arbitraire.

Evitons d’être des pessimistes culturels et essayons plutôt d’aiguiser notre sens du tragique. Contrairement au pessimisme culturel, le sens du tragique sous-entend l’accident, le hasard, pour lesquels les Allemands ont un très joli mot : « der Zufall ». Les Français ont un meilleur mot : « le hasard ». Chaque accident, chaque hasard, chaque Zufall inattendu, signifie que le temps reste ouvert. Dans notre quête de notre nouvelle identité, l’histoire nous reste toujours ouverte. Par conséquent, l’écoulement du temps nous offre à tous de nouvelles pistes inattendues vers la liberté. Nous devons juste saisir la bonne occasion.

Il n’est pas étonnant qu’au niveau de notre subconscient nous nous sentions tous attirés d’abord vers notre groupe, vers notre tribu, comme le note notre ami Kevin MacDonald – surtout en cas d’urgence, ou en cas de hasard. Quand nous voyageons en Afrique ou en Asie, et quand nous descendons dans un hôtel, nous cherchons instinctivement un contact oculaire avec un Blanc d’Europe ou d’Amérique. Ici à Madrid, nous n’avons aucun intérêt à savoir si la personne qui nous croise est un Espagnol. Mais les temps changent rapidement : il y a des endroits, à Los Angeles, ou dans le monde souterrain du métro parisien, où le passager blanc, tard dans la nuit, est heureux de repérer une personne de son phénotype. Leur contact oculaire en dit long sur leur identité commune soudainement récupérée.

Cependant, comme mentionné précédemment dans notre bref regard sur le carnage qui eut lieu au sein de la même tribu dans la dernière aventure des Niebelungen, il y a des questions critiques que nous devons poser quant à notre identité commune. Il y a d’innombrables exemples historiques où l’identité commune mène à la haine et à la guerre civile au sein de la même tribu, du même groupe. Les guerres civiles entre et parmi les Européens et les Américains ont été, de loin, beaucoup plus meurtrières que les guerres qu’ils ont menées contre l’Autre.

A titre hypothétique, si les Européens blancs et les Américains blancs avaient les moyens d’établir leur propre ethno-Etat, avec leur propre identité commune et raciale, qui peut nous garantir que cet ethno-Etat entièrement blanc ne serait pas à nouveau en proie à des divisions internes et à des guerres civiles ?

La bataille d’Alamo, en 1836, porte toujours un message vif pour nous tous ici. La douzaine de défenseurs irlandais qui ont perdu la vie en défendant Alamo contre le siège de Santa Anna jouèrent un rôle crucial dans la prolongation et la capture mexicaine d’Alamo. Pourtant, nous devons aussi nous rappeler que, dix ans plus tard, plusieurs centaines d’Irlandais – le célèbre Bataillon « Saint-Patrick » – furent, avec d’autres immigrés européens catholiques, les loyaux combattants du côté mexicain, au cours de la guerre américano-mexicaine. Lorsque la guerre prit fin, des dizaines d’Irlandais furent pendus comme criminels de droit commun par les troupes américaines victorieuses.

Jusqu’à une époque récente, l’idée d’une identité européenne blanche n’existait pas. Par exemple, l’attaque turque sur l’Europe, au XVIe et au XVIIe siècle, ne fut pas motivée par une question de race : elle avait des racines religieuses. Beaucoup de clans serbes, croates et hongrois chrétiens et leurs chefs s’alliaient parfois aux envahisseurs turcs pour différentes raisons politiques. De même, mille ans plus tôt, de nombreuses tribus germaniques se sont alliées aux Huns d’Attila et se sont battues contre leurs propres frères dans les Champs Catalauniques, en 451 après JC.

Il y a d’innombrables exemples historiques où le système de croyance ou la politique de puissance ont joué un rôle beaucoup plus important dans le processus de la construction d’identité que la question de la race.

Un autre exemple : la Seconde Guerre mondiale fut aussi une guerre civile européenne entre les puissances et les peuples du même fond génétique mais appartenant à différents systèmes de croyance. Les principaux acteurs politiques utilisaient souvent des non-Européens comme troupes auxiliaires. Dans la Wehrmacht, il y avait de petites unités composées d’Arabes, d’Indiens et de tribus turques luttant contre les Américains blancs et les troupes soviétiques blanches. Les GIs américains, après leur débarquement en Normandie en 1944 et en Italie en 1943, prirent souvent certains soldats capturés sous l’uniforme allemand pour des Japonais, ignorant le fait que ces soldats combattant du côté de l’Axe étaient des volontaires venus des régions de l’Union soviétique occupées par les Allemands.

* Ma conclusion finale : Il n’y a pas de doute que le facteur héréditaire joue un rôle de premier plan dans notre identité. Très souvent, nous n’en sommes pas conscients. Nous pouvons changer notre physionomie, nous pouvons changer notre passeport, nous pouvons changer notre idéologie ou notre théologie. Nous pouvons également effacer notre mémoire culturelle en quittant notre patrie et en nous installant dans un pays lointain. Cependant, il n’y a strictement aucun moyen d’enlever les couches de gènes transmis par nos ancêtres. Mais nous ne pouvons pas non plus effacer les couches de notre mémoire.

Notre avant-guerre civile : la pathologie de la culpabilité blanche

Je tiens à préciser : même dans le meilleur des cas, il est douteux que l’on puisse facilement créer notre identité dans un ethno-Etat totalement blanc. Cette question troublante est heureusement abordée de plus en plus par nous tous. Pour ma part, je suis beaucoup plus préoccupé par le caractère de nombreux nationalistes blancs. Beaucoup de ces personnes s’imaginent qu’elles peuvent construire leur identité sur la base de leur physique blanc. Ironiquement, même nos pires détracteurs sont souvent des personnes de notre propre patrimoine génétique. Par exemple, si vous regardez brièvement le profil racial ou ethnique des gens qui font des manifestations de masse – les soi-disant antifascistes – en faveur des immigrés non européens, vous serez surpris de constater que la plupart d’entre eux sont des Blancs urbains. Peu d’immigrés non européens participent à ce genre de manifestations de masse.

Le clergé catholique européen constitue également un cas à part. La plupart des dénominations chrétiennes sont devenues aujourd’hui les plus ardents défenseurs de l’immigration non blanche. Pourquoi l’Eglise a-t-elle choisi cette voie ? La genèse de la pathologie de la culpabilité blanche, ainsi que l’esprit destructif du monothéisme chrétien nécessiteraient de ma part une conférence distincte.

Lorsque la chute finale arrivera, et cela ne peut pas être exclu pour l’Europe et l’Amérique, les lignes de démarcation entre l’ennemi et l’ami ne seront pas claires du tout. Il n’y aura aucun affrontement pittoresque entre Blancs et non-Blancs. Il faut être prêt à faire face à de nombreuses personnes de notre propre fond génétique qui seront de l’autre côté de la barricade.

Dans ma conclusion finale, je tiens à dire que nous devons éviter les personnes qui tiennent leur identité blanche pour un hobby … un passe-temps … une vogue … ou pour un moyen de faire de l’argent. Ces personnes nous rendent ridicules et nous discréditent en nous faisant passer pour une menace publique. Notre premier objectif doit être non seulement la résurrection de notre sentiment racial, mais aussi, comme chez nos ancêtres, de notre sens du tragique. C’est l’unique voie que nous devons prendre afin de continuer notre lutte prométhéenne, et cela quel que soit le nombre d’entre nous qui resteront sur le champ de bataille.

Je vous remercie de votre attention.

Tomislav Sunic Ecrivain 8/11/2013

LE POINT ( Paris) le 2 juillet, 20013, interview T. SUNIC "Croatie dans l'UE : "Je crains que l'Europe ne devienne une nouvelle Yougoslavie"

www.lepoint.fr/monde/croatie-dans-l-ue-je-crains-que-l-europe-ne-devienne-une-nouvelle-yougoslavie-01-07-2013-1687952_24.php

Croatie dans l'UE : "Je crains que l'Europe ne devienne une nouvelle Yougoslavie"Le Point.fr- Publié le 01/07/2013 à 20:37- Modifié le 01/07/2013 à 20:39

Pour l'essayiste croate Tomislav Sunic, qui regrette l'adhésion de son pays, l'Union européenne a sacrifié la politique sur l'autel de l'économie.

Tomislav Sunic rappelle que seule une petite minorité de Croates a ratifié l'entrée du pays dans l'Union européenne, en 2012.

Tomislav Sunic rappelle que seule une petite minorité de Croates a ratifié l'entrée du pays dans l'Union européenne, en 2012.© DIMITAR DILKOFF / AFP

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Propos recueillis par Jason Wiels

Tom Sunic

C'est une voix discordante dans le concert de célébrations organisées en Croatie pour l'entrée du pays au sein de l'Union européenne, officialisée ce 1er juillet 2013. Tomislav Sunic, croate et américain, ancien diplomate et professeur en sciences politiques, désormais intellectuel à plein temps, a grandi dans la détestation du communisme version Tito. En janvier 2012, il a voté contre l'entrée de son pays dans l'Union européenne. Lui qui a appris le français en lisant "les lettres de Daudet" et "la plume d'Aron" dit naviguer librement entre la pensée économique de gauche et une approche de la culture de droite. Conflit serbo-croate, situation économique difficile, corruption..., l'auteur de La Croatie : un pays par défaut ? (2010, éd. Avatar) se montre plus que pessimiste quand on lui demande si cette adhésion peut aider à régler les problèmes de son pays. Entretien.

Le Point.fr : Quel regard portez-vous sur l'entrée de la Croatie dans l'UE ?

Tomislav Sunic : Pour l'heure, je pense que l'Union européenne, telle qu'on peut l'observer, relève plus d'un "constructivisme académique" que d'une réalité politique qui refléterait la volonté de ses peuples. C'est le problème essentiel. En fait, le projet européen tel qu'il est, je le crains, me rappelle beaucoup l'ancienne République deYougoslavie.

Si c'est le cas, on peut s'attendre à un avenir qui déchante...

Bien sûr, la désintégration yougoslave ayant abouti à des guerres inutiles et désastreuses. Conçu sur papier à la fin de la Première Guerre mondiale, le projet yougoslave semblait tout à fait valable, sauf que plusieurs mythologies nationalistes (slovène, serbe, croate, etc.) allaient finalement conduire à son éclatement sauvage. Au niveau européen, il me semble que l'on procède là aussi à des élargissements sans vraiment sonder le terrain.

Que voulez-vous dire?

Je ne suis pas le seul à penser que le projet européen est mal défini. Depuis le Traité de Rome en 1957 jusqu'à aujourd'hui, il se dirige d'abord vers "l'économisme", soit un capitalisme sauvage, et favorise la création d'une oligarchie mondialiste... Fatalement, cela va rejaillir sur le sort des peuples. Regardez par exemple le Mécanisme de stabilité européen, qui donne une immunité quasi totale à des décideurs non élus. Ils échappent au triage démocratique !

Que la Commission et la Banque centrale européenne rédigent nos lois, dans la grammaire comme dans la substance, voilà un projet qui me paraît particulièrement anti-démocratique. C'est ce qui me fait prédire que l'on se dirige malheureusement plus vers une rupture que vers une consolidation européenne. Bruxelles parle un langage économique, mécanique, super-capitaliste, qui nous fait mal, qu'on soit croate, français, de gauche ou de droite.

L'adhésion de la Croatie a pourtant été entérinée par un vote démocratique [66,67 % des votants ont dit oui, NDLR].

Certes, mais ce référendum a souffert de 60 % d'abstention [56,46 % exactement, NDLR]. Ce n'est donc qu'une petite couche de la population qui a voté oui. Si l'on compare à 1991, 85 % de Croates s'étaient déclarés pour la sécession d'avec la Serbie. Voilà un plébiscite qui était non seulement légal mais doté d'une légitimité à part entière. Dans le cas du référendum pour l'UE, on a fait chuter à dessein le palier de votes pour rendre le référendum valide...

De plus, il faut savoir que l'immense majorité de la classe politique croate est composée des nostalgiques de la Yougoslavie de Tito, que ce soit le président, Ivo Josipovic, ou même le Premier ministre, Zoran Milanovic (centre gauche, élu en 2011), issu d'une célèbre famille communiste. Des gens qui, paradoxalement, sont devenus les principaux supporters de l'"intégration" ! Ils pensent que tous nos problèmes vont être résolus à Bruxelles, par une pluie d'argent. Je caricature, mais c'est l'esprit.

Justement, l'économie croate compte 20 % de chômeurs, 50 % chez les jeunes. L'Europe a promis une enveloppe de 14 milliards d'euros au pays. N'est-ce pas là un signe positif ?

Tout à fait, nous sortons de quatre années sans croissance, même si notre dette souveraine reste bien inférieure à celle de la France par exemple [59 % du PIB contre 91,7 %, NDLR]. N'oublions pas aussi que toutes les familles ont leur expatrié (en Europe, en Amérique du Sud, etc.), ce qui permet de s'entraider. On a une vraie culture de la débrouille, aussi. Je ne pense pas que notre situation soit catastrophique.

En revanche, je pense que ce sont les grands apparatchiks de l'UE, tel M. Barroso, qui ont besoin de la Croatie plutôt que le contraire. Pour se donner bonne conscience, pour dire : "Regardez comment on continue d'intégrer." Et de faire un peu oublier au passage les cas grecs et portugais, qui ont pourtant été, à l'époque, les premiers bénéficiaires des aides européennes...

La Croatie est classée 62e sur l'indice de perception de la corruption par l'ONG Transparency International. Que faire pour lutter contre ?

C'est un de nos grands problèmes, c'est certain. Nous n'avons pas eu, comme vous en France en 1945, une "épuration" en 1945 après la fin de la guerre. Nous aurions dû nous débarrasser des membres de la police secrète, nous n'avons pas assez fait table rase de la période communiste.

L'entrée dans l'UE peut tout de même constituer une étape pour tourner la page du passé. Par exemple, en aidant à enterrer la hache de guerre avec Belgrade ?

N'oublions pas que, dans les années 90, quand beaucoup de Croates étaient pro-européens, Bruxelles ne s'était pas donné beaucoup de peine pour stopper les atrocités entre la Croatie et la Serbie.

Par ailleurs, je pense que cette adhésion ne résout en rien la question de la vérité historique, qui nous mine d'un côté comme de l'autre de la frontière. Je plaide pour une grande conférence qui réunirait des intellectuels de tous horizons pour qu'on règle une fois pour toutes la question de la "victimologie". C'est-à-dire qu'on se débarrasse de cette bataille de chiffres, dans laquelle on compte nos morts de part et d'autre sans souci des faits. Mes compatriotes construisent trop souvent leur identité de "bon Croate" en opposition avec le "mauvais Serbe". Il faut vraiment sortir de cette nécessité d'exister dans le dénigrement de l'autre...

Mais que ce soit à Bruxelles, Zagreb ou Belgrade, tout le monde est imprégné du même "économisme". Tout se résume aux mathématiques, aux chiffres. Il faudrait plutôt mettre en valeur nos idées spirituelles, intellectuelles, culturelles. Je suis pour une Europe culturelle, que l'on parle tous les langues des uns et des autres, plutôt qu'un mauvais anglais.

De l’amélioration de l’homme par le bombardement de terreur, Tribune libre de Tomislav Sunic

Polémia

Bundesarchiv Bild 183-Z0309-310, Zerstörtes Dresden.jpg

Du 13 au 15 février 1945, les forteresses volantes de la Royal Air Force et de l’U.S.

Air Force déversaient sur la ville de Dresde, merveille de l’Elbe, des centaines de milliers de bombes au phosphore, détruisant une grande partie de la ville et tuant un nombre jamais encore défini d’habitants et réfugiés. Chaque année depuis la réunification de l’Allemagne, bravant les interdictions officielles et le refus de la majorité des Allemands d’y participer, de timides commémorations en mémoire des victimes se déroulent dans la ville qui a admirablement reconstruit ses trésors architecturaux. A l’occasion de ce soixante-huitième anniversaire, Tomislav Sunic, de nationalité croate, diplomate, traducteur, professeur de science politique et historien, auteur de nombreux ouvrages et articles dont certains ont été présentés par Polémia, exprime, dans une tribune libre, ses réactions sur le sort inégal réservé aux victimes innocentes de la dernière guerre. Fort de son expérience yougoslave, il fait de la ville martyre un symbole et annonce avant l’heure un cycle européen qui sera fait de violence et de guerres civiles.


Dresde n’est pas le seul symbole des crimes alliés – symbole qui est d’ailleurs mentionné à contrecœur par les politiciens du Système. La destruction de Dresde et le nombre des victimes sont toujours relativisés dans l’historiographie du Système, étant souvent dépeints comme « un dommage collatéral dans la lutte contre le mal absolu, à savoir le fascisme ». Or le problème réside dans le fait qu’il n’y a pas eu un seul dommage collatéral dans une seule ville nommée Dresde, mais aussi des dommages

collatéraux dans d’autres Dresde, dans tous les coins de l’Allemagne, et dans toutes les parties de l’Europe. La topographie de la mort, tracée par les anciens antifascistes, reste une donnée fort problématique pour leurs descendants d’aujourd’hui.

L’inégalité des victimes

Dans « la concurrence mondiale pour la mémoire historique », toutes les victimes ne bénéficient pas des mêmes droits. Maintes victimologies l’emportent sur les autres tandis que beaucoup d’autres sont censées tomber dans l’oubli total. Les politiciens du Système sont très zélés quand il s’agit d’ériger des monuments aux peuples et aux tribus, en particulier à ceux qui furent victimes des Européens. Un nombre croissant de dates anniversaires et de jours de réparations apparaissent sur nos calendriers muraux. De plus en plus, les dirigeants du Système européen et américain rendent hommage aux victimes non européennes. Rarement, presque jamais, ils se souviennent des victimes de leurs propres peuples qui ont souffert sous la terreur communiste et libérale. Comme mauvais auteurs de crimes figurent toujours les Européens, et surtout les Allemands, qui sont donc toujours contraints aux rites de repentance.

Non seulement Dresde est une ville allemande, ou bien le symbole d’un destin allemand, mais elle est aussi le symbole européen d’innombrables villes croates, hongroises, italiennes, belges et françaises qui furent bombardées par les Alliés. Ce qui m’attache à Dresde m’attache également à Lisieux, un lieu de pèlerinage en France qui fut bombardé par les Alliés en juin 1944, comme un autre lieu de pèlerinage, italien celui-là, Monte Cassino, qui fut également bombardé par les Alliés en février 1944. A Lisieux, cette petite ville dédiée à sainte Thérèse, le 10 juin 1944, 1200 personnes furent tuées, le monastère bénédictin fut complètement détruit et 20 religieuses perdirent la vie. Pour dresser la liste des villes européennes de haute culture qui ont été détruites, il nous faudrait une bibliothèque – à condition toutefois que cette bibliothèque ne soit pas une nouvelle fois bombardée par les « world improvers » (*); et à condition que les livres et les documents qu’elle contient ne soient pas confisqués ni interdits de circulation.

En France, pendant la Seconde Guerre mondiale, environ 70.000 civils trouvèrent la mort sous les bombes anglo-américaines et démocratiques, chiffre qui est mentionné avec réticence par les historiens du Système. 600.000 tonnes de bombes furent larguées sur la France de 1941 à 1944, 100.000 bâtiments et des maisons furent détruits. Dans le Système actuel, les politiciens utilisent souvent les mots « culture » et « multiculture » ; or, force est de constater que leurs prédécesseurs militaires se sont distingués dans la destruction des divers monuments culturels européens.

Anéantissement culturel

Ces églises et ces musées européens devaient être détruits car ces endroits, y compris Dresde, n’entraient pas dans la catégorie de la culture. Plus au sud, à Vienne, en mars 1945, le Burgtheater fut bombardé par les avions américains. Plus à l’ouest, au nord de l’Italie, l’opéra de « La Scala » de Milan fut bombardé, ainsi que des centaines de bibliothèques à travers toute l’Europe centrale. Plus au sud, en Croatie, des villes de grande culture, telles que Zadar et Split, furent bombardées en 1944 par les « world improvers », et ce panorama d’horreur n’a pas de fin. Des politiciens allemands et des touristes allemands prennent souvent des vacances sur la côte croate, alors que le long de la côte il y a de nombreux charniers de cadavres de soldats allemands. Sur l’île croate de Rab, où les nudistes allemands aiment bien s’amuser, il y a une énorme fosse commune contenant les ossements de centaines d’Allemands assassinés par les communistes yougoslaves. Les diplomates allemands en Croatie n’ont rien fait pour ériger des monuments à ces soldats martyrisés. Récemment, la soi-disant communauté de valeurs démocratique s’est montrée très préoccupée du nettoyage ethnique en ex-Yougoslavie et s’est donné beaucoup de mal pour traduire les accusés serbes et yougoslaves devant le Tribunal de La Haye. Mais ces accusés yougoslaves avaient eu des modèles parfaits parmi leurs ancêtres yougo-communistes et leurs alliés anglo-américains. Vers la fin de 1944, et au début de 1945, il y eut, en Yougoslavie, un énorme nettoyage ethnique des Allemands de souche par les communistes yougoslaves.

En mai 1945, des centaines de milliers de réfugiés croates, pour la plupart des civils, se sont rendus aux autorités anglo-américaines au sud de la Carinthie, à côté de Klagenfurt en Autriche méridionale. Dans les jours qui suivirent, ils furent tous livrés aux bouchers yougo-communistes.

On tue et on expulse

En ce qui concerne les millions d’Allemands de souche chassés de Silésie, de Poméranie, des Sudètes et du bassin du Danube vers la fin de la guerre (**), je pourrais parler pendant des heures. Vu que ces victimes sont dues aux bourreaux communistes, je ne vais pas pour le moment les attribuer aux « world improvers » occidentaux. Rétrospectivement, nous voyons toutefois que les réformateurs occidentaux n’auraient jamais pu réaliser leurs projets de rénovation du monde sans l’aide des bourreaux communistes, y compris les soi-disant antifascistes. Certes, la plus grande migration de l’histoire du peuple allemand et des autres peuples non allemands en Europe centrale et en Europe de l’Est fut suscitée par les communistes et l’Armée rouge, mais jamais ces gigantesques crimes communistes n’auraient pu avoir lieu sans l’aide aérienne massive des « world improvers ». Donc, on utilise deux poids et deux mesures quand on commémore les morts de la Seconde Guerre mondiale.

Les droits de l’homme à la carte

Comme le grand spécialiste de droit international, l’Allemand Carl Schmitt, nous l’a enseigné, nous faisons face ici à un problème dangereux quant au droit international moderne et quant à l’idéologie des droits de l’homme. Une fois l’adversaire militaire déclaré « monstre » ou « vermine », les droits de l’homme ne s’appliquent plus à lui. Les monstres et les vermines ne sont protégés par aucune loi. C’est la composante principale du Système actuel. De même, dès qu’un intellectuel européen, un universitaire ou un journaliste non conformiste commence à contester les mythes du Système actuel, il court le risque d’être traité comme un « homme d’extrême droite », c’est-à-dire comme « un monstre fasciste ». Par conséquent, ce monstre d’extrême droite ou ce fasciste et cette espèce inhumaine ne peut jamais devenir un homme ; par conséquent, aucune idéologie des droits de l’homme ne peut lui venir au secours.

Il devient sujet à l’ostracisme social et à la mort professionnelle. Le Système se targue de sa tolérance envers toutes les personnes du monde et envers toutes les nations du monde, mais non envers ceux qui sont a priori étiquetés comme inhumains, à savoir les pseudo-extrémistes de droite. Aux yeux des « world improvers », les civils allemands de Dresde, ici sur cette place, en février 1945, n’étaient pas perçus comme des êtres humains mais comme un genre spécial de vermine qu’on devait supprimer. On trouve des sentiments similaires aujourd’hui chez les « world improvers » dans leurs opérations militaires en Irak ou en Afghanistan.

On nous accuse parfois d’exagérer le chiffre des victimes de Dresde dans le seul but de banaliser les crimes fascistes. Cela n’a pas de sens. Cette proposition mensongère peut facilement être inversée. Les médias du Système et ses faiseurs d’opinion ont besoin, même 70 ans après la guerre, du danger fasciste, dans le seul but de mieux cacher leurs propres désastres économiques et leurs propres crimes de guerre d’antan.

Fragilité du Système multiculturel

Par ailleurs, les historiens du Système ainsi que les faiseurs d’opinion ignorent que le Système multiculturel actuel est par force conflictuel : chaque doctrine victimaire persiste dans sa propre unicité et ne se propage qu’aux dépens des autres. Cela montre la fragilité du Système multiculturel. Enfin de compte, cela conduit à la balkanisation, à la guerre civile et à l’effondrement du Système. Voici un exemple : l’atmosphère victimaire d’aujourd’hui, dans le Système multiculturel, conduit chaque tribu, chaque communauté, chaque immigré non européen à croire que sa doctrine victimaire doit être unique. Il s’agit là d’un phénomène dangereux, car chaque unicité victimaire exclut les autres victimes qui se trouvent en concurrence avec elle. Une telle mentalité victimaire ne contribue ni à la prévention des conflits ni à la paix. Elle conduit à la violence multiethnique et rend le conflit inévitable.

Suite à la banalisation et la relativisation des crimes libéralo communistes contre le peuple allemand, avant, pendant et après la Seconde Guerre mondiale, il n’y a pas eu de climat de compréhension mutuelle ni de réconciliation. Au lieu de cela, un climat de fausses mythologies et de victimologies conflictuelles est né, où chaque homme, et chaque tribu, se perçoit comme la victime de son voisin.

L’exemple classique est à nouveau l’effondrement de l’ancien Etat artificiel de Yougoslavie où les différents peuples furent pendant cinquante ans victimes des historiens communistes et où la propagande communiste dépeignait le peuple croate comme une « nation nazie ». En 1991, après la chute du communisme et après la fin de la propagande communiste, le résultat ne fut pas la compréhension mutuelle entre les divers peuples yougoslaves mais la haine mutuelle et la guerre terrible où toutes les parties s’insultèrent en se traitant de « fascistes ». Ce qui nous attend bientôt dans l’UE n’est pas le plaisir exotique d’une société multiculturelle, mais un nouveau cycle similaire et balkanique de violence et de guerres civiles.

Ne nous faisons pas d’illusions. Dresde est, certes, un endroit symbolique contre toutes les guerres, et également l’endroit où nous devons nous incliner devant les victimes innocentes. Mais demain, Dresde peut facilement devenir le symbole de catastrophes titanesques. On peut déjà imaginer ce qui nous attend dans les prochaines années. Certains parmi nous qui possèdent une longue conscience historique savent fort bien qu’un monde a pris fin. L’âge libéral est mort depuis longtemps. Les temps qui viennent seront mauvais. Mais ces mauvais temps nous offrent, à nous tous, une chance.

Tomislav Sunic, 13/02/2013.

www.tomsunic.com

Les intertitres sont de la rédaction.

Notes :

(*) Ceux qui « améliorent » le monde, les réf ormateurs.

(**) « Les Expulsés »

Correspondance Polémia – 21/02/2013

Image : du 13 au 15 f évrier 1945 à Dresde

Crédit photo : File:Bundesarchiv Bild 183-Z0309-310, Zerstörtes Dresden.jpg

Le Harfang (Magazine de la fédération des Québécois de souche) Février - Mars 2013 N0 3, Vol.1. Entretien avec Dr Tom Sunic p. 16 -19

Le Docteur Tom Sunic est auteur, traducteur, ancien professeur en sciences politiques, ancien diplomate, membre du conseil d’administration de l’American Third Position. Il est l’auteur de Homo americanus: Child of the Postmodern Age (2007), avec une préface du Professeur Kevin MacDonald. La troisième édition de son livre American Against Democracy and Equality; the European New Right, préfacé par Alain de Benoist, vient juste d’être lancée. Il est également l’auteur de La Croatie : un pays par défaut ? (2010) et Rejeton de l’ère postmoderne (2010).

Le Harfang– Au moment de cette entrevue, vous étiez en pleine tournée de conférences en Europe avec le professeur Kevin MacDonald. Pourriez-vous nous en dire davantage sur le sujet « nationalisme et individualisme »?

Tom Sunic – Durant notre tournée en Suède et au Danemark, dans la dernière semaine de mai et la première de juin, Kevin et moi avons regardé la dichotomie entre le nationalisme et l’individualisme. Ma position est que le concept et la pratique du nationalisme du 19ème siècle doivent être rejetés. Cela a créé des torts immenses à tous les peuples blancs, des guerres civiles incessantes, comme on a pu le voir en ex-Yougoslavie. À la place, l’identité des peuples d’exaction européenne doit se baser sur un éveil racial et culturel commun, sans tenir compte de la place où ils peuvent résider. Dans mes discours, j’ai tenté de déconstruire la doctrine libérale d’interchangeabilité des races et j’ai également argumenté (en me basant sur mes propres écrits et ceux d’autres auteurs) que la vision libérale et marxiste d’un « homme » individuel abstrait mène nécessairement à donner peu de valeur de tous les hommes, toutes les races et toutes les nations. Le libéralisme, avec son jumeau le marxisme et son avatar moderne le multiculturalisme, sont des systèmes profondément inhumains. Par contre, la race, comme je le dis souvent, et en me basant sur mes lectures d’Hans Günther, Ludwig F. Clauss et Julius Evola, ne peut pas être utilisée comme le seul critère pour étudier les changements politiques et sociaux et la stabilité. Lorsque le concept de race est utilisé comme seul moyen d’analyser des problèmes sociaux et politiques, cela mène à des conclusions réductionnistes et exclusivistes, comme nos ennemis gauchistes le disent à raison. Inversement, la réalité des races et la différentiation raciale ne peuvent être niées et encore moins démonisées comme nos détracteurs gauchistes font souvent. La race est un facteur important lorsqu’on étudie le caractère des individus, le comportement des nations, et elle peut nous aider à pousser plus loin dans le sophisme du système multiculturaliste, appelé de façon euphémique « société multiculturelle » par nos élites gouvernantes.

Le Harfang– Vous avez mentionné que le nationalisme n’est pas perçu de la même façon aux États-Unis et dans les pays européens. Pourriez-vous élaborer?

TS – Les Blancs en Amérique du Nord ont un avantage extraordinaire en bénéficiant d’une unité raciale et linguistique qui s’étend de l’Alaska à l’Arkansas. C’est un phénomène unique qui, je l'espère, servira de moteur pour la résurgence d’une identité raciale blanche à travers le monde. Les Américains blancs, contrairement aux nationalistes européens mutuellement exclusifs et souvent querelleurs, sans égards à leurs diverses racines européennes, peuvent exprimer plus librement le mot « nationalisme » dans le sens où il englobe tous les Européens blancs présents sur le continent nord-américain. N’oublions pas qu’il n’y a pas un tel concept de nationalisme blanc aussi inclusif en Europe. Il y a des séparatistes nationalistes français comme les Bretons blancs, les Catalans blancs, les Corses blancs ou les Slovènes blancs. Même si leur mémoire culturelle et historique leur donne un certain besoin de préserver leur identité, cela mène également à des frictions et des conflits sans fin avec leurs voisins immédiats. Les peuples d’extraction européenne doivent finalement surmonter ces écarts haineux interethniques s’ils veulent survivre. Les inquiétudes ont changé drastiquement en ce début de XXIème siècle. Les peuples blancs descendants des Européens font clairement face à l’extinction qu’ils vivent au Chili ou au Tennessee et ce, peu importe toute l’animosité qu’ils ressentent pour les autres. Qui plus est, nous devons toujours nous demander qui profite de ces disputes Croates-Serbes, Québécois-Canadiens, Irlandais-Britanniques, Espagnols-Catalans…

Le Harfang– Les partis nationalistes semblent prendre du gallon en Europe mais ici, les groupes nationalistes semblent rester marginaux. Qu’est-ce qui explique cette différence? Est-ce seulement une question d’organisation?

TS – Pour nos échecs, nous ne devons pas blâmer les autres ; nous devons nous blâmer. En se basant sur ce que je viens de dire, nous devons organiser un cadre pour des activités militantes éducatives et restaurer notre hégémonie culturelle, aujourd’hui dominée par la gauche. Pas besoin de manifestations de masse ou de beaucoup d’argent pour entreprendre ce projet. Ceux qui utilisent ces arguments pour tenter de légitimer leurs actions sont paralysés par la peur et cherchent un alibi. Ce qui est nécessaire, c’est d’avoir des gens avec une haute conscience civique et un sens des sacrifices. Nous pouvons commencer avec une série de conférences dans toutes les villes canadiennes avec des sujets comme la littérature classique, l’histoire, l’art, la sociobiologie moderne. Il y a des gens avec des compétences et de l’expertise.

Le Harfang – Vous avez mentionné à plusieurs reprises que, dans le futur, plusieurs pays rejetteront le capitalisme et le multiculturalisme. Comment cela peut-il se faire ? La plupart des élites qui ont critiqué le multiculturalisme (Merkel, Cameron, Sarkozy) n’ont rien fait pour faire changer la situation. Comment les changements auront-ils lieu ?

TS - L’immigration étrangère non-européenne est une conséquence de l’idéologie libérale et non sa cause. Des millions d’immigrants non-Blancs suivent simplement la logique mystique du marché qui a pour conséquence le transfert des emplois, la réduction de l’industrie manufacturière et la réduction des salaires. Les immigrants non européens représentent une armée utile de travailleurs bon marché pour les super classes libérales ploutocratiques. Les classes dirigeantes ne peuvent pas même concevoir et encore moins promouvoir l’éveil racial et culturel, qu’ils s’appellent Sarkozy, Cameron, Merkel ou Harper. Le racialisme et le capitalisme sont incompatibles. Par exemple, promouvoir l’éveil racial au Canada ou aux Etats- Unis, tout en tentant de conserver la structure capitaliste du système, est une contradiction pure et simple. Si le Canada, les États-Unis ou l’Europe voulaient se débarrasser des immigrants, ils devraient d’abord démanteler la théologie du marché libre qui permet en premier lieu l’immigration extra européenne. Rappelez-vous ce que le très adulé fondateur du capitalisme Adam Smith a écrit : « Un marchant n’est pas nécessairement le citoyen d’un pays en particulier. Il est en grande mesure indifférent au lieu où il fait son commerce. » (An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations, 2 vols) Les racines de notre malaise mondialiste peuvent être directement liées à cet homme. Un mélange quelconque d’industries publiques et privées, précédées d’une forte conscience raciale et culturelle, restent la seule alternative pour les Blancs d’Europe et d’Amérique. Heureusement, nous avons assez de preuves empiriques aujourd’hui pour prouver l’échec du libéralisme. J’écris à propos de ce sujet dans mes livres.

Le Harfang - Vous avez écrit un commentaire positif sur l’œuvre de Kyle Bristow, White Apocalypse. Quelle est la place de la fiction dans notre combat?

TS - Bristow est un jeune auteur talentueux. Il a un bon sens de la langue, l’intrigue est bien développée et sa description des personnages principaux montre qu’il saisit bien leur psychologie. Dans mes émissions radiophoniques, je conseille fréquemment à mes auditeurs de lire des classiques, dont certains écrits par des auteurs modernes, comme A. Bierce, L.F. Céline, H. Covington, E. Jünger et plusieurs autres. Lire des romans et de la poésie peut aider les jeunes nationalistes à enrichir leur sens de la métaphore et les aider à confronter verbalement leurs détracteurs gauchistes. Seulement lire des essais politiques ou de la prose raciste n’est pas assez. La culture occidentale est beaucoup plus importante que ça.

Le Harfang – Dans votre livre La Croatie: un pays par défaut? , vous parlez des fausses identités. Que voulez-vous dire par là ?

TS – Dans ce livre, je décris le nationalisme réactif versus le nationalisme proactif, le nationalisme réactif étant un élément tragique de tous les nationalismes européens. Jusqu’à un certain point, l’analyse du nationalisme ethnique qui a imprégné la Croatie suite au démantèlement de l’ex-Yougoslavie en 1991 pourrait aussi s’appliquer en analysant la question du Québec. Le nationalisme réactif croate était une réponse directe au précédent nationalisme agressif serbe. Ou, pour le dire de façon rhétorique, est-ce que la Croatie existerait si ce n’était du nationalisme agressif serbe et yougoslave? J’en doute. Malheureusement, plusieurs Croates, même au niveau officiel, n’expriment leur nationalisme croate qu’à travers la haine des Serbes. Il y a même une blague en Croatie qui va comme suit : « Le leader serbo-yougoslave Slobodan Milosevic, lorsqu’il a lancé sa guerre d’agression contre la République croate en 1991, a moussé le sentiment nationaliste des Croates, ce qui les aida à former leur propre État séparé. » C’est un exemple typique de « nationalisme par défaut ». À propos de cette identité « par défaut », je me retrouve à être en désaccord avec de nombreux nationalistes croates, et également avec plusieurs nationalistes blancs ou racialistes et ce, peu importe le drapeau qu’ils peuvent agiter. Pourquoi ont-ils toujours besoin de la présence de « l’autre méchant » pour s’affirmer? Avec une analyse plus large, le nationalisme réactif pourrait également être appliqué à l’étude de la question québécoise et nous aider à comprendre l’identité québécoise, en grande partie due aux politiques assimilationnistes agressives et mal pensées de l’Empire britannique. C’est faux de chérir une mauvaise image de nous-mêmes en la projetant sur le méchant Juif, Arabe ou Noir, ou encoresur notre détestable voisin blanc. C’est un mauvais départ pour un processus de « réveil racial ou national ». Mon point est que nous devons être fiers de qui nous sommes, mais pas au prix de restreindre notre fierté à la haine ou la suppression de l’autre. Mon livre est bien annoté et je crois qu’il offre de bonnes analyses de cette problématique complexe et très importante de l’identité à notre époque.

Le Harfang – Dans votre ouvrage In Homo A m e r i c a n u s : Rejeton de l'ère postmoderne, vous comparez la Croatie communiste à l’Amérique contemporaine. Si la comparaison tient la route, comment percevez-vous le Canada avec ses tribunaux des Droits de l’Homme?

TS – Dans mon livre, publié en anglais et en français, je discute en profondeur des cas légaux et du lexique reliés à la liberté d’expression, notamment le soi-disant discours haineux, les nouveaux maîtres à penser et comment la répression intellectuelle en Occident fonctionne. Ma thèse est que l’avantage du communisme en Europe de l’Est repose dans la vulgarité de son imagerie et de ses discours (la langue de bois) et sa répression violente. Même un homme de la rue pouvait voir les mensonges communistes. Ainsi, tout le monde pouvait clairement voir que le communisme n’était qu’un système intellectuel mensonger et la pire fraude jamais vue. Par contre, la répression moderne en Occident, particulièrement au Canada et en Allemagne, est beaucoup plus élégante et, de ce fait même, insidieuse; elle se camoufle derrière le verbiage de « liber té d’expression », « diversité », « tolérance » et « droits de l’homme ». Elle est donc plus efficace pour censurer un dissident ou hérétique potentiel.

Le Harfang – Vous parlez un français impeccable et avez voyagé au Canada dans le passé, alors vous connaissez sûrement la problématique du Québec. Qu’elle est votre opinion générale? La situation est-elle similaire à celle des Balkans où vous avez travaillé pendant des années ? TS - Il y a des parallèles évidents. Lorsque la Croatie déclara son indépendance de la Yougoslavie en 1991, les Serbes de Croatie, qui formaient 10% de la population de la Croatie, principalement concentrés dans les contrées rurales de la région de Krajina, firent valoir que si la Croatie osait se séparer de la Yougoslavie (où les Serbes étaient favorisés par de la discrimination positive dans toutes les sphères de la société), eux aussi devaient avoir le droit de se séparer et de former leur propre État miniature. Ils réussirent en effet à former leur mini-État financé par la Serbie avant de se faire renverser par l’armée croate en 1995. C’est une forme t y pique de balkanisation nationaliste que j’ai discuté auparavant. Je suis d’accord avec les péquistes canadiens (sic) et avec leur souhait d’avoir un État libre du Québec, mais c’est un problème avec de multiples facettes. Un Québec souverain pourrait rétablir une justice historique vis-à-vis des impérialistes britanniques, mais ce qui se passe aujourd’hui est beaucoup plus complexe. Les opposants les plus farouches au projet d’un Québec Libre ne sont plus les WASP, mais des millions d’immigrants du Tiers-Monde et des aborigènes locaux, qui ne s’inquiètent pas du tout de l’identité du pays qu’ils habitent, tant et aussi longtemps qu’ils reçoivent des avantages sociaux et que leur statut de « victimes » leur permettre d’en récolter davantage. Ils représentent une menace raciale, démographique et culturelle pour les Québécois et également pour les Canadiens britanniques. De la même façon, je n’écarte pas la possibilité que lorsque la Croatie se joindra à l’Union européenne, elle sera submergée d’immigrants d’Afrique du Nord à un point tel qu’elle doive regarder nostalgiquement en arrière pour former une nouvelle réunion avec les Serbes blancs, afin de lutter contre le chaos racial. C’est la question à laquelle tous les Blancs, soient-ils Américains, Québécois, Serbes ou Croates, devront faire face dans les années à venir.

Le Harfang – Vous avez écrit de nombreux livres, vous donnez des conférences, vous avez votre site Web et vous avez votre propre émission de radio, Voice of Reason. J’imagine que vous avez un message à passer ; comment pourriez-vous le résumer ?

TS – Hégémonie culturelle. En travaillant sur les champs de bataille culturelle, d’immenses résultats peuvent être obtenus. Ne surestimez pas le système libéral ; il est extrêmement fragile. Les porteurs de ce système n’y croient même pas ; ils ne font que suivre l’odeur de l’argent. J’ai été le témoin oculaire de la façon dont les porteurs du système communiste ont changé de camp pour devenir des libéraux en quelques semaines en ex- Yougoslavie. Nous devons apprendre de la gauche ; nous devons propager nos propres discours, imposer notre musique et nos mœurs, faire revivre nos penseurs jetés dans le trou de l’oubli libéral, penseurs qui sont à la fois traditionnels et hypermodernes, que nous pourrions appeler « archéofuturistes ». Ça peut être fait. Nous avons des gens de savoir et d’intégrité. Où il y a une volonté, il y a une voie. Le Harfang – Qu’aimeriez-vous dire aux Québécois?

TS – Tous les peuples européens doivent s’unir. Et vive le Québec libre! Pour en apprendre sur l’œuvre et la pensée de Tom Sunic, rendez vous sur: tomsunic.com et reasonradionetwork.com. p. 18 - Février - Mars 2013

Février - Mars 2013 - p.19

Homo sovieticus, homo americanus ? Catholica Hiver 2007-08, Nr. 98

Tomislav Sunic, essayiste croate et traducteur, ayant longuement séjourné aux Etats-Unis où il a enseigné la science politique, vit actuellement dans son pays d’origine. Il a récemment publié un ouvrage intitulé Homo Americanus : Child of the Postmodern Age (BookSurge, Charleston 2007, 15.99 $), avec une préface de l’historien Kevin MacDonald. L’auteur a accepté de s’expliquer sur le parallèle suggéré par son titre, de prime abord audacieux, avec l’homo sovieticus de Zinoviev.

CATHOLICA – Vous effectuez une longue comparaison entre le système soviétique et le système américain, et entre les types humains qui les caractérisent. Dans la description de la culture sociale américaine, vous notez une sorte de phobie de l’autorité, sous l’effet de l’égalitarisme. Peut-on vraiment établir un parallèle avec le communisme?

TOMISLAV SUNIC – Un mot tout d’abord au sujet du titre de mon livre. J’ai d’abord été tenté par l’expression boobus americanus, inventée par le grand écrivain américain, H. L Mencken. Mais le boobus a une connotation limitée, restreinte au cadre provincial des Etats Unis; cette expression décrit plutôt un Américain un peu bête et d’esprit provincial (on dirait en France un plouc) ne reflétant guère le système-monde comme le font si bien les expressions homo sovieticus et homo americanus.

A propos de l’autorité, de laquelle parle-t-on? On n’a pas forcément besoin de la police et de l’armée pour imposer son autorité. En dehors des grandes métropoles américaines et en dehors de quelques cercles clos qui partagent les mêmes intérêts intellectuels, l’Amérique est un pays très autoritaire au sens large du terme. C’est la fameuse autocensure américaine relevant de l’esprit calviniste et vétérotestamentaire qui rend la vie difficile dans les petites villes américaines pour un intellectuel européen. Rien à voir avec le vrai individualisme civique et spirituel dont, malgré l’américanisation outrancière, on perçoit encore les signes en Europe. Le prétendu individualisme américain est une contradiction en soi ; partout règne l’esprit grégaire qui se manifeste, bien sûr, en fonction de la tribu, du lobby politique, ou de la chapelle religieuse à laquelle on appartient. Tocqueville en parle dans son livre, De la démocratie en Amérique. Or le problème inquiétant, c’est que les Américains se perçoivent et se posent devant le monde entier comme des individualistes et des libertaires modèles alors qu’en réalité, tout véritable individualisme est incompatible avec l’esprit de l’homo americanus. A l’instar de l’Union Soviétique, la réussite professionnelle en Amérique exige qu’on “joue le jeu” et qu’on ne “fasse pas de vagues.” Cette fausse convivialité Âœcuménique est surtout visible aujourd’hui dans l’Amérique multiculturelle où il faut être extrêmement prudent dans le choix des mots. Même le terme “multiculturalisme” que l’on utilise abondamment en Occident est un tic de la langue de bois américaine dont la naissance remonte aux années 1970. Multiethnisme conviendrait mieux pour décrire la situation atomisée du système américain… et occidental.

Quant au système ex-soviétique et à sa prétendue structure pyramidale et hiérarchique il nous faut nous débarrasser des demies vérités relayées par les ex-soviétologues et autres kremlinologues occidentaux. Le système communiste fut parfaitement démocratique au vrai sens du terme. Une fois terminés les grands massacres et achevée l’élimination des élites russes et est- européennes dans les années 1950, de larges masses purent jouir, en Russie comme en Europe orientale, et dans le moule communiste, d’une qualité de vie dont on ne pouvait que rêver en Occident. La vie sans soucis, quoique spartiate, assurait à tous une paresse facile — pourvu qu’on ne touchât pas au mythe fondateur communiste. Alexandre Zinoviev fut l’un des rares écrivains à bien saisir l’attraction phénoménale et la pérennité de l’homo sovieticus”. En fait, si le communisme a disparu à l’Est, comme l’a dit Del Noce, c’est parce qu’il s’est encore mieux réalisé à l’Ouest, notamment en Amérique multiethnique et égalitaire.

Dans votre livre, vous procédez à l’analyse du décor et de l’envers du décor, si je puis m’exprimer ainsi. Par exemple, vous relevez que les grands médias, dans l’image qu’ils cultivent sans cesse d’eux-mêmes, se présentent comme des contestataires du pouvoir, alors qu’en réalité ils en constituent l’un des principaux piliers. Vous vous intéressez ainsi non seulement aux représentations conceptualisées, mais également au langage et à sa transformation. Pouvez-vous dire ce qui a attiré votre attention sur ces points, et en particulier quelle fonction vous attribuez à la «gestion de la langue»?

En Amérique, les grands médias ne constituent aucunement un contre-pouvoir. Ils sont le pouvoir eux-mêmes et ce sont eux qui façonnent le cadre et le dénouement de tout événement politique. Les politiciens américains sondent au préalable le pouls des medias avant de prendre une décision quelle qu’elle soit. Il s’agit d’une synthèse politico- médiatique qui règne partout en Occident. Quant au langage officiel utilisé par les faiseurs de l’opinion américaine tout discours politico- médiatique est censé recourir aux phrases au conditionnel ; les politiciens et les medias, et même les professeurs d’université, abordent toujours les thèmes politiques avec une grande circonspection. Ils recourent de plus en plus à des locutions interrogatives telles que “pourrait- t-on dire? ” ou “le gouvernement serait-il capable de”..?”, etc. Ici, nous voyons à nouveau l’auto-abnégation chère au calvinisme mais transposée cette fois dans le langage châtré de la communication officielle. Les phrase lourdes, à connotation négative, où on exprime un jugement de valeur, disons sur Israël, l’Iraq, ou un autre problème politique grave, sont rares et prudemment feutrées par l’usage d’adjectifs neutres.

Cette “langue de coton”, de provenance américaine, on la voit se propager de plus en plus en France et en Allemagne. On est témoin de locutions américaines très en vogue et “soft” en Europe qui disent tout et rien à la fois : je pense notamment aux adverbes neutres de provenance américaine tels que “considerably”, “apparently” etc. – dont l’usage fréquent permet à tout homme public d’assurer ses arrières.

Pouvez-vous, en tant que vous-même avez été professeur dans une université américaine bien représentative, indiquer quelle couche de l’intelligentsia possède un pouvoir réel, et de quelle manière concrète elle l’exerce au quotidien, en particulier dans le contrôle du langage, et pour quelle raison il en va ainsi? Contrairement à ce qu’on dit en Europe, les universités américaines, surtout les départements de sciences sociales, jouent un rôle fort important dans la fabrication de l’opinion publique. On lit régulièrement dans la grande presse américaine les “editorials” écrits par des professeurs connus. Quoique l’Amérique se targue de son Premier Amendement, et notamment de sa totale liberté d’expression, les règlements universitaires témoignent d’une véritable police de la pensée. La haute éducation est une chasse gardée des anciens gauchistes et trotskistes recyclés, où toute recherche indépendante allant à l’encontre des mythes égalitaires et multiethnique peut aboutir à de sérieux ennuis (jusques et y compris le licenciement) pour les esprits libres. Nombreux sont les cas où de grands spécialistes en histoire contemporaine ou en anthropologie doivent comparaître devant des “Comités de formation à la sensibilité interethnique universitaires” (“Committees for ethnic sensitivity training”) pour se disculper d’accusations de “fascisme” et de “racisme.” Malgré la prétendue fin de tous les grands récits, il y a, dans notre postmodernité, un champ de thèmes tabous où il vaut mieux ne pas se hasarder. Très en vogue depuis dix ans, l’expression “hate speech” (discours de haine) n’est que le dernier barbarisme lexical américain grâce auquel on cherche à faire taire les mal-pensants. Le vrai problème commence quand cette expression s’introduit dans le langage juridique du code pénal, comme ce fut le cas récemment avec une proposition législative du Sénat américain (HR 1955). Je ne vois aucune différence entre le lexique inquisitorial américain et celui de l’ex-Yougoslavie ou de l’ex-Union soviétique, sauf que le langage de l’homo americanus est plus insidieux parce que plus difficile à déchiffrer.

A propos du pouvoir (au sens générique), le système américain d’aujourd’hui est-il, ou n’est-il pas le prototype, ou l’aile avancée de la «démocratie» postmoderne, dans laquelle tout le monde est censé contribuer à la «gouvernance» globale sans que personne soit réellement identifiable comme responsable des décisions qu’il prend?

Voilà la mystique démocratique qui sert toujours d’appât pour les masses déracinées ! Dans le système collectiviste de l’ex-Union soviétique, et aujourd’hui de façon similaire en Amérique, on vivait dans l’irresponsabilité collective. Rien d’étrange. L’irresponsabilité civique n’est que la conséquence logique de l’égalitarisme parce que selon les dogmes égalitaires libéralo-communistes, tout homme est censé avoir sa part du gâteau. A l’époque de la Yougoslavie communiste, tout le monde jouait le double jeu de la chapardise et de la débrouillardise, d’une part, et du mimétisme avec le brave homo sovieticus, d’autre part, du fait même que toute propriété et tout discours appartenaient à un État-monstre. Par conséquent, tout le monde, y compris les apparatchiks communistes, se moquait de cet État-monstre dont chacun, à son niveau social, cherchait à tirer un maximum d’avantages matériels.

Le vocable gouvernance n’est qu’un piège supplémentaire du langage technoscientifique tellement cher à l’homo americanus. D’une manière inédite, les classes qui nous gouvernent, en recourant à ce nouveau vocable, conviennent qu’il en est fini de cette ère libéralo-parlementaire, et que c’est aux “experts” anonymes de nous tirer hors du chaos.

On a largement étudié les Etats-Unis comme nouvelle forme d’empire, une forme appelée à périr à force d’étendre ses conquêtes au-delà de ses capacités, selon une sorte de loi inexorable d’autodestruction. Mais au-delà de cette perspective – que l’on supposera ici fondée, par hypothèse – ne peut-on pas voir dans l’américanisme postmoderne la fin de la modernité, fin à la fois comme achèvement et comme épuisement?

Le paradoxe de l’américanisme et de son pendant l’homo americanus consiste dans le fait qu’il peut fonctionner à merveille ailleurs dans le monde et même mieux que dans sa patrie d’origine. Même si un de ces jours, l’Amérique en tant qu’entité politique se désagrège (ce qui n’est pas du tout exclu) et même si l’Amérique disparaît de la mappemonde, l’homo americanus aura certainement encore de beaux jours devant lui dans différentes contrées du monde. Nous pouvons tracer un parallèle avec l’esprit de l’homo sovieticus, qui malgré la fin de son système d’origine est bel et bien vivant quoique sous une forme différente. Oublions les signifiants – regardons plutôt les signifiés postmodernes. À titre d’exemple, prenons le cas des nouvelles classes politiques en Europe orientale y compris en Croatie, où quasiment tout l’appareil étatique et soi- disant non communiste se compose d’anciens fonctionnaires communistes suivis par des masses anciennement communisées. L’héritage communiste n’empêche pas les Croates d’adopter aujourd’hui un américanisme à outrance et de se montrer aux yeux des diplomates des Etats-Unis plus américanisés que les Américains eux-mêmes! Il y a certes une généalogie commune entre le communisme et l’américanisme, notamment leur esprit égalitaire et leur histoire linéaire. Mais il y a également chez les ex-communistes croates, lituaniens ou hongrois, un complexe d’infériorité conjugué à une évidente servilité philo- américaine dont le but est de plaire aux politiciens américains. Après tout, il leur faut se disculper de leur passé douteux, voire même criminel et génocidaire. Il n’y a pas si longtemps que les ex-communistes croates faisaient encore leurs pèlerinages obligatoires à Belgrade et à Moscou ; aujourd’hui, leurs nouveaux lieux saints sont Washington et Tel Aviv. Malgré l’usure de l’expérience américaine aux USA, l’Amérique peut toujours compter sur la soumission totale des classes dirigeantes dans tous les pays est-européens.

L’anti-américanisme de beaucoup de marxistes européens s’est fréquemment mué depuis plusieurs décennies en admiration pour la société américaine. Au-delà du retournement opportuniste, ne croyez-vous pas qu’il puisse s’agir d’une adhésion intellectuelle, de quelque chose comme l’intuition que l’Amérique postmoderne représente une certaine incarnation de l’utopie socialiste, alors même que le capitalisme y domine de manière criante?

Après l’effondrement de son repoussoir dialectique qu’était l’Union soviétique, il était logique que beaucoup d’anciens marxistes européens et américains se convertissent à l’américanisme. Regardons l’entourage néo- conservateur du président George W. Bush ou de la candidate présidentielle Hillary Clinton: il se compose essentiellement d’anciens trotskistes et d’anciens sympathisants titistes dont le but principal est de parachever le grand rêve soviétique, à savoir l’amélioration du monde et la fin de l’histoire. Il n’y a aucune surprise à voir le Double devenir le Même ! L’ancien rêve calviniste de créer une Jérusalem nouvelle, projetée aux quatre coins de monde, se conjugue avec les nouvelles démarches mondialistes de nature mercantiles. Or au moins pour un esprit critique, il y a aujourd’hui un avantage épistémologique ; il est plus facile de s’apercevoir maintenant des profondes failles du système américain. L’anticommunisme primaire de l’époque de la guerre froide qui donnait une légitimité à l’Amérique par à rapport à son Autre n’est plus de mise. On ne peut plus cacher, même aux masses américaines incultes, que le système américain est fragile et qu’il risque d’éclater à tout moment. N’oublions jamais la fin soudaine du système soviétique qu’on croyait invincible. Le capitalisme sauvage et la pauvreté grandissante en Amérique ne vont pas de pair avec le prêchi-prêcha sur les droits de l’homme et les matins qui chantent.

Il se dégage de l’ensemble de votre ouvrage, dont le titre pourrait être traduit L’homo americanus, ce rejeton de l’ère postmoderne, que les phénomènes que vous décrivez conduisent à produire en masse un type d’humanité dégradé, sans repères, sans racines, sans idéal. Dans la mesure où ce diagnostic est fondé (même s’il ne concerne pas également la totalité des Américains), n’est-ce pas la preuve de l’échec, non seulement du projet de régénération qui était à l’origine des Etats-Unis, mais de l’humanisme tout entier, tel qu’il a été affirmé au début de la période moderne?

Soyons honnêtes. Nous sommes tous plus ou moins des homini americani. L’américanisme, à l’instar du communisme, est parfaitement compatible avec l’état de nature cher aux plus bas instincts de tout homme. Mais donner dans un anti-américanisme primaire, comme celui que revendique l’extrême droite européenne et surtout française, ne repose pas sur une bonne analyse du système américain. En Amérique, surtout chez les Sudistes, il y a des couches populaires, quoique très rares, qui préservent le concept d’honneur largement perdu en Europe.

On a tort de nourrir des fantasmes au sujet des prétendues visées impérialistes des Américains sur l’Europe et l’Eurasie, comme c’est le cas chez de nombreux droitiers européens victimes de leur propre manie du complot. À part son délire biblique et son surmoi eschatologique incarné dans l’État d’Israël – qui représentent tous deux un danger pour la paix mondiale – l’engagement américain en Europe et ailleurs n’est que le résultat du vide géopolitique causé par les incessantes guerres civiles européennes. Il est fort possible que la guerre balkanique ait eu un bel avenir sanguinaire sans l’intervention militaire des Américains. Qu’ont-ils donc à offrir, les fameux communautarismes européens, hormis les fantasmes sur un empire européen et euroasiatique ? Au moins, les Américains de souche européenne ont réussi à se débarrasser des querelles de chapelles identitaires qui font toujours le bagage des peuples européens.

Le sens prométhéen, l’esprit d’entreprise et le goût du risque sont toujours plus forts en Amérique qu’en Europe. L’Amérique pourrait offrir, dans un proche avenir, encore de belles surprises à la civilisation européenne. Entretien recueilli par Bernard Dumont

Réfléchir & Agir (été, 2011) Tom Sunic (en français) entretien avec Tomislav Sunic Homo americanus rejeton de l’ère post-moderne

R&A: Le grand dissident russe Alexandre Zinoviev, qui avait fui le communisme pour rejoindre le camp de la liberté dont les Etats-Unis étaient l’emblème, avait inventé le terme d’homo sovieticus. Vous parlez, vous, d’homo americanus. A priori, en quoi ces deux types d’hommes se ressemblent-ils ?

TS: C’est l’état d’esprit tout d’abord. Il y a de braves homini sovietici en France du coté de Paris qui sont connus sous le nom de Gauche caviar. C’est le Même et son Double qui changent de lieux en fonction des idées à la mode. Aujourd’hui c’est l’utopie libérale qui mène la dance. D’où le fait que les anciens soixante-huitards français, les ex-communistes yougos, ou bien les scribes postsoviétiques n’ont eu aucun problème à se recycler subitement en de bons apôtres de l’américanisme. Les idées de la parousie communiste sont beaucoup plus réalisables en mimant l’esprit de l’homo americanus. Les ressemblances ? Eh bien, c’est la croyance dans le progrès, l’esprit égalitaire, le faux sentimentalisme, soit sous sa forme biblique, soit sous sa forme eschatologique visant le meilleur des mondes. Bref, tous les deux sont dépourvus du sens du tragique. C’est le signifiant qui nous trompe. Le fond du signifié, pourtant est toujours – le Même.

R&A: Quels sont les piliers idéologiques de ces deux formes de régime ?

TS: Toujours les mêmes quant à l’idéologie du Même : l’égalitarisme, le mondialisme et l’économisme. Non, il ne s’agit pas de la trahison des clercs par la Gauche occidentale et par les anciens apparatchiks soviétiques. Il y a bien longtemps qu’ils s’étaient rendus compte que les grands récits égalitaires et progressistes seraient beaucoup mieux véhiculés par l’Amérique et sa classe politico-médiatique. Le discours sur la fin d l’histoire, la grande « partouze » multiethnique et multiraciale, autrement portée aux nues par les bolcheviks, est cette fois-ci devenue la réalité opérationnelle en Amérique. Il faut préciser que j’utilise les termes américanisme ou homo americanus comme synonymes de libéralisme et d’homo economicus. Ceci dit, il y a des homini americani plus acharnés en Europe qu’en Amérique

R&A: Ne trouvez-vous pas qu’il est un peu hardi de comparer la terreur d’état communiste et le totalitarisme américain ?

TS: Absolument. Je préfère boire du coca que d’imaginer porter le casque soviétique sur ma tête. Entre Guantanamo et le Goulag, chacun son choix ! Mais quelles sont les conséquences pour la survie de l’esprit libre dans l’américanisme à longue durée ?- voilà la question. L’américanisme a réussi à neutraliser la sphère politique d’une manière plus efficace. Même la notion de dissidence, voire l’idée d’une rébellion quelconque, n’a aucun sens dans l’américanosphère. Le mal physique infligé dans les taules communistes et la vie spartiate de l’univers communiste – peu nombreux sont ceux qui tout en se targuant d’antiaméricanisme seraient prêts à renoncer aux délices de l’American way of life ! Moi compris. Mais regardons les choses à l’inverse. Peu nombreux furent ceux, dans l’univers communiste, qui voulurent échanger leur comportement d’homo sovieticus contre celui d’homo americanus sans se rassurer au préalable grâce à l’image-miroir d’une Amérique riche et opulente. Ce fut la comparaison avec son homologue américain dans l’imaginaire de l’homo sovieticus qui conduisit l’Union soviétique à la débâcle. Imaginez un monde effrayant où l’on perd la notion de comparaison. L’Amérique, étant aujourd’hui le seul hégémon au monde, et n’ayant pour l’instant aucun double, y a bel et bien réussi.

R&A: La démocratie existe-t-elle en Amérique ?

TS: Le terme « démocratie » est la plus grande blague lexicale du dernier millénaire ! Quand quelqu’un s’écrie « vive la démocratie » !, je me demande à qui cela sert-il, cui bono, qui a intérêt à se parer de ce vocable ? Vous pensez à Tocqueville ou bien à Evola qui nous on décrit la démocratie en Amérique ? Ou bien à Kim Il Sung qui fut un démocrate à part entière comme son homologue Bush et d‘autres figures politiques plus récentes ? Nos ancêtres gaulois, islandais, et même les Illyriens ou proto-Slaves de ma région furent démocrates — chacun à sa façon. Peut–être le furent-ils même plus que nous-mêmes ? En effet, de quelle démocratie parle- t- on aujourd’hui? Plébiscitaire ? Totalitaire ? Représentative ? Ça me dépasse. L’Amérique est un pays qu’on pourrait qualifier de ploutocratie oligarchique au sommet, mais avec une base qui repose encore sur un fonds populaire et démocratique.

R&A: A mes yeux, il y a toutefois une énorme différence entre le communisme et l’américanisme: la liberté d’expression qui me parait totale en Amérique ?

TS: Cela va sans dire. L’Amérique avec ses grands espaces me manque. La Constitution américaine, bien loin de la fameuse loi Fabius -Gayssot, vous donne le droit de porter les armes et d’arborer sur votre poitrine n’importe quel signe distinctif, que ce soit la croix gammée, l’étoile rouge ou un médaillon de la Vierge Marie. Mais attention. Il faut distinguer entre le corpus législatif et les contre-pouvoirs médiatique et académique qui utilisent parfois des méthodes beaucoup plus répressives qu’en Europe pour faire taire les critiques. C’est la notion de ridicule dont les faiseurs d’opinion se servent pour faire taire les trouble-fête. On a beau être démonisé comme facho-monstre, comme c’est le cas en France, on vous accordera néanmoins une certaine dose de crédibilité. En Amérique, en revanche, une fois que vous et votre travail deviennent la cible du ridicule médiatique, vous n’existez plus. La plupart des mouvances racialistes et nationalistes en Amérique ne sont pas considérées comme sérieuses du fait même de leur mimétisme avec le Double paléo-fasciste de provenance hollywoodienne ; de ce fait, ils ne peuvent inspirer aucune crédibilité. On peut parler de grotesque infrapolitique. Le système américain a besoin de ces farfelus nazis hollywoodiens afin de montrer au monde que l’Amérique est le pays de la plus grande tolérance. C’est faux. Les usines à penser, les universités et les grands media fonctionnent d’une manière crypto-soviétique et utilisant le jeu du ridicule pour discréditer l’adversaire. A quoi bon posséder la protection de la loi quand l’esprit libre n’arrive jamais à rien dire au plus grand monde ? Tous les groupuscules dissidents sérieux, tous les partis politiques dès qu’ils acquièrent une certaine visibilité, sont immédiatement mis sous surveillance. De puissants lobbies tels le SPLC et l’ADL usent de leur poids auprès des universités et des maisons d’édition pour discréditer chaque idée non conformiste. Prenez le cas de Pat Buchanan ou du professeur Kevin Mac Donald qui furent mis au pas, ce sont deux bons exemples du procédé.

R&A: Existe-t-il des tabous au sein de la société américaine ?

TS: Il y a des tabous que les Américains ont eux- mêmes créés et qui sont typiques de l’autocensure paléo-puritaine. Mais il y a des tabous imposés par le système libéral, tels que la religion civique de l’Holocauste et le dogme de l’infaillibilité du système multiracial. Certes, par rapport à l’Europe, on peut parler ouvertement et d’une manière critique de n’importe quoi, mais en général, on ne peut s’exprimer que dans des groupes marginaux qui ont peu d’impact sur les idées dominantes.

R&A: Reconnaît-on l’existence des races aux Etats-Unis ou les nie-t-on comme en Europe ?

TS: A notre époque du politiquement correct, la notion de race ne peut avoir droit de cité. On trouve l’explication de cette éclipse dans les années d’après la Deuxième guerre mondiale, quand s’est instauré le nouvel ordre mondial. À titre privé, nous tous, de droite ou de gauche, et de n’importe quelle race, savons fort bien que les races existent bel et bien. Au niveau juridique, on fait semblant, en Europe et en Amérique, de considérer que les races sont uniquement une question exotique de peau différente et rien d’autre. Or dites- moi combien de Prix Nobel en sciences sont-ils décrochés chaque année par des Blancs et combien par des Nègres ? A l’heure actuelle et malgré l’idéologie du métissage qui règne en Occident, les Américains blancs ont une conscience raciale plus prononcée que les Européens blancs. C’est ce que mon collègue, le sociobiologiste Kevin Macdonald appelle « implicit whiteness ». N’oublions pas que les mythes fondateurs américains trouvèrent une base solide dans la pensée racialiste. Les penseurs des Lumières étaient à des années lumière de la pensée dominante supraracialiste qu’on prend aujourd’hui pour argent comptant.

R&A: Comment définiriez-vous l’américanisme ?

TS: Il y a eu un glissement sémantique avec ce vocable. En Europe, on utilise souvent ce terme et dans un sens nettement péjoratif. L’Américanisme signifie aujourd’hui un système-monde gouverné par le capital de façon métastatique. En ce qui concerne la fameuse Amérique profonde, notamment l’antebellum South qui persiste encore dans quelques contrées et que j’aime bien — c’est autre chose et cela n’a rien à voir avec l’américanisme d’aujourd’hui . Je renvoie vos lecteurs à Maurice Bardèche et à son beau livre Sparte et les Sudistes.

R&A: Quelles sont les origines du politiquement correct ?

TS: Les origines du politiquement correct sont à chercher dans les événements qui ont accompagné les purges d’intellectuels au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, en France et en Allemagne. J’ai rédigé un long article sur la genèse du langage politiquement correct dans la revue Catholica. En Amérique, le politiquement correct trouve ses origines dans le mélange de la pensée vétérotestamentaire et de la pensée marxiste.

R&A: Quelles sont les sources du fondamentalisme américain ?

TS: La Bible. Où que l’on tourne les yeux en Amérique, à droite et à gauche, on s’aperçoit de l’hypermoralisme du langage. Et cet hypermoralimse provient directement de la Bible. La Bible donne une parfaite bonne conscience, même dans ses modalités séculières, aux élites américaines, surtout lorsqu’ elles se lancent dans des guerres incessantes contre la notion de Mal. Autrefois, ce Mal absolu fut incarné par le Sud ; ensuite ce fut le tour des Allemands et ensuite vinrent les communistes. Aujourd’hui, le Mal absolu est incarné par les Islamistes. L’Amérique est par excellence un pays dont la théologie politique est centrée sur la Bible.

R&A: En quoi les Juifs peuvent apparaître comme des facteurs dissolvants de l’Amérique traditionnelle ?

TS: On peut poser la même question concernant l’Europe. Il y a une tonne de livres qui vous expliquent ce malaise et notamment les ouvrages académiques de Kevin Macdonald qui rencontrent un grand écho chez les racialistes blancs aux Etats-Unis. Toujours le Même qui veut être le Double, à savoir le Goy qui se veut plus juif que les Juifs eux-mêmes. Le problème ne réside pas dans les Juifs mais bien dans le mimétisme monothéiste qui par le biais de l’avatar chrétien se manifeste chez tous les Européens. Ce sont les Chrétiens sionistes en Amérique (ou ici l’Europe catholique traditionnelle) qui n’arrivent pas à se débarrasser de cette névrose philosémite et de son Double antisémite. De nouveaux chaos nous attendent.

R&A: Vous parlez de l’Ecole de Francfort. Pourriez-vous nous rappeler qui sont ses promoteurs et leurs idées fondamentales ? Diriez-vous comme votre préfacier Kevin MacDonald qu’ils ont mis au point un programme de guerre ethnique ?

TS: Afin de comprendre les idées qui gouvernent le monde, et tracer la pathogenèse du politiquement correct, if faut absolument étudier à fond la pensée de la fameuse Ecole de Francfort. C’est là que réside le problème fondamental de notre époque. L’Ecole de Francfort et ses émules, comme les philosophes marxisants Horkheimer, Adorno, Marcuse, ont complètement détruit par leurs écrits la notion de sacré chez les jeunes Européens et par-dessus tout imposé par le biais des victimologies surréelles un sentiment de culpabilité pathologique chez tous les peuples blancs.

R&A: Peut-on considérer que les oligarchies qui dirigent le monde ont fait des Etats-Unis un vaste laboratoire de leurs théories et idées comme préalable à la future société mondiale universalisée ?

TS: Les premières esquisses de ce monde universalisé nous furent déjà tracées par les théologiens chrétiens avec leur civitas dei. Donc rien de nouveau sous le soleil. Sauf que dans le monde des satellites et des ordinateurs, ce monde se rétrécit ; le sens de l’espace perd son sens. La bonne nouvelle, et j’espère que je ne me trompe pas, c’est que nous sommes déjà entrés dans l’implosion générale. Sauve qui peut !

R&A: L’Amérique n’est –elle pas en train de donner naissance au dernier homme dont parlait Nietzsche ?

TS: Tout à fait. Sauf que l’homo americanus n’est pas propre à la seule Amérique. C’est une figure transpolitique mondiale qui réside partout et surtout en Europe.

Tomislav (Tom) Sunic (http://TomSunic.com/) est écrivain, traducteur, ancien professeur de sciences politiques aux États-Unis, et ancien diplomate croate. Il est le conseiller culturel de l’ American Third Party Position (American3P.org/leadership). Il a publié de nombreux articles en anglais, français, allemand et croate dans diverses publications. Il est auteur de Against Democracy and Equality: The European New Right (Arktos, 1990, 2002, 2011), préfacé par Alain de Benoist et Homo americanus: Child of the Postmodern Age (BookSurge, 2007), préfacé par Kevin MacDonald. Ses livres en français, récemment parus, sont La Croatie; un pays par défaut ? (éd. Avatar 2010) et Homo americanus ; rejeton de l’ère postmoderne (éd. Akribea, 2010).

Source: Réfléchir & Agir.

Grande Europe et terrorisme intellectuel RIVAROL (le 16 mai, 2003)

C'est le 16 avril, après le oui triomphal (83,8 %) des Hongrois à l'Union, qu'a été "couronnée" à Athènes l'Europe de 25, sanctionnée par un traité de 5 000 pages qu'ont signé pour la France Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin avec la bénédiction de Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, sous l'égide de laquelle s'inscrit donc la "Nouvelle Europe". Un parrainage assez inquiétant, notamment en ce qui concerne la liberté d'expression. La police de la pensée est difficile à repérer car elle se cache souvent sous les concepts rassurants de "démocratie" et "droits de l'homme." Si les Quinze exhibent volontiers les beautés de leurs paragraphes constitutionnels, ils admettent rarement les ambiguïtés de leur Code pénal. Et c'est dans une grande discrétion que l'an dernier, la Commission européenne avait tenu a Bruxelles, et à Strasbourg des réunions d'une importance historique sur l’avenir de la libre parole.

Sujet de discussion? La promulgation de la nouvelle législation européenne instituant le "crime de haine" et appelée à se substituer aux législations nationales pour devenir automatiquement la loi dans tous les Etats européens, de la Grèce à la Belgique, du Danemark au Portugal. Si bien que toute personne poursuivie pour "crime de haine" dans tel pays de l'Union pourra être jugée et condamnée dans tel autre.

Rétrospectivement, cette loi supranationale apparaît inspirée du code criminel communiste de la défunte Union soviétique ou de l’ex- Yougoslavie communiste, lequel a recouru pendant des décennies à un méta-langage irréel, surtout dans les paragraphes portant sur "la propagande hostile" (Code criminel, Article 133). Une telle abstraction sémantique pouvait s'appliquer à tout dissident - qu'il se soit livré à des violences physiques contre l'Etat yougoslave ou qu'il ait simplement proféré quelque blague.

Pour l'instant, le Royaume-Uni témoigne du degré le plus élevé des libertés civiles en Europe, l'Allemagne le plus bas. Le Parlement britannique a récemment rejeté le principe "de crime de haine", proposé par divers groupes de pression - ce qui n'empêche pas que outre-Manche, des allogènes poursuivis par des "de souche" aient bénéficié d'un non-lieu, les juges hésitant à prononcer des peines sévères de crainte d’être accusés eux-mêmes de cultiver un « préjugé racial ». Ainsi, indépendamment du manque de censure en Grande-Bretagne, un certain degré d’autocensure existe, que la loi proposée par l'UE entérinera donc.

Depuis 1994, l'Allemagne, le Canada et l'Australie ont renforcé leur législation contre les déviants, révisionnistes et nationalistes en particulier. Plusieurs centaines de citoyens allemands, y compris un certain nombre d’intellectuels, ont été accusés d'incitation à la haine raciale ou de « négation de l’Holocauste », cela sur la base d’un néologisme bizarre et néo- totalitaire relevant de l'article 130 ("Volkshetze" : incitation aux ressentiments populaires).

Vue le caractère alambiqué des articles, il devient facile de mettre n’importe quel journaliste ou professeur en mauvaise posture s’il ose s’éloigner du credo sur l’histoire contemporaine ou critiquer le nombre élevé d'immigrés extra-européens. En Allemagne, par exemple, contrairement à l’Angleterre et à l’Amérique, il y a une longue tradition légale d’après laquelle ce qui n'est pas explicitement permis est interdit. En Amérique et en Angleterre, la pratique légale présuppose que ce qui n'est pas spécifiquement interdit est permis. C’est la raison pour laquelle l'Allemagne a adopté des lois rigoureuses contre le « négationnisme ». En 2002, lors de sa visite en Allemagne, l’historien américain d’origine juive, Norman Finkelstein a suggéré à la classe politique allemande de cesser d'être la «victime délibérée » des groupes de pression "de l'industrie de l’holocauste" ( titre de son essai tant controversé). Il a également fait remarqué que l’attitude servile des Allemands pourrait être totalement contre-productive en favorisant un antisémitisme aujourd’hui bien caché. Mais personne n’a su réagir positivement aux avertissements de Finkelstein, de peur d'être dénoncé comme antisémite. A l’inverse, le gouvernement allemand a accepté pour la énième fois de verser 5 milliards d'euros supplémentaires aux 800 000 survivants de la Shoah.

Quand on interdit la discussion de matières taboues, le climat de lâcheté intellectuelle s’alourdit. Une nation empêchant la libre parole et l'expression libre de vues politiques diverses – même si ces vues peuvent paraître aberrantes – peut-elle être encore appelée démocratique ? Bien que les Etats-Unis se targuent de leur «First Amendement », le discours libre dans les média et dans les universités y est pratiquement impossible. L’autocensure didactique l’emporte. Souvent les professeurs américains évitent les expressions ou avis politiquement incorrects, redoutant de compromettre leur carrière. Une pratique croissante en Amérique veut que les professeurs donnent de bonnes notes à des médiocres étudiants de souche non européenne, afin d'éviter des ennuis judiciaires, ou pis, de perdre leur travail.

En France, depuis la loi Fabius-Gayssot, proposée par un député communiste et adoptée en juillet 1990 (puis aggravée à l’initiative du député chiraquien Pierre Lellouche en décembre 2002), toute personne exprimant en public un doute au sujet de l’historiographie contemporaine risque de sérieuses amendes et même l'emprisonnement. Un certain nombre d'auteurs et de journalistes français, allemands et autrichiens sont persécutés, pourchassés, emprisonnés, d’autres ont demandé l'asile politique en Syrie, en Suède ou en Amérique. Quelques-uns se sont même installés dans les pays de l’Est. Des mesures répressives semblables ont été récemment décrétées en Australie, au Canada et en Belgique multiculturelle. Plusieurs dirigeants nationalistes est-européens, en particulier croates, souhaitant rendre visite à leurs compatriotes expatriés au Canada ou en Australie n’ont pas obtenu le visa pour ces pays en raison de leurs prétendues vues «extrémistes ».

Pour l'instant la Russie et d'autres pays ex-post-communistes ne pratiquent pas la même répression de la pensée libre et l’on voit dans les libraires croates des traductions d’ouvrages français ou allemands impubliables en France ou en Allemagne. Mais en raison de la pression croissante de Bruxelles et de Washington, cela va changer. L’adhésion à l’Union européenne des anciens satellites requiert de ces derniers un alignement sur la pensée unique et l’apprentissage d’une nouvelle langue de bois aussi redoutable que celle de l’époque communiste.

Croire que la terreur d'Etat, c’est-à-dire le totalitarisme, ne peut qu’être le produit d’une idéologie violente véhiculée par une poignée de bandits, est fort répandu et l’on a beaucoup entendu cet argument récemment à propos de l’Irak . Mais cette idée est fausse. La démocratie triomphante aussi, qui pousse à l’abdication intellectuelle dans le grand consensus mou, constitue une tentation totalitaire. Le terrorisme intellectuel grandit et se propage grâce à la croyance généralisée que, d’une façon ou d’une autre, les choses finiront par s’améliorer toutes seules. Or, l'apathie sociale croissante et l’autocensure galopante parmi un nombre croissant d’intellectuels européens apportent de l’eau au moulin de la police de la pensée. Au fond, comme l’écrit Claude Polin, l'esprit totalitaire est l'absence de tout esprit.

TOMISLAV SUNIC
(écrivain croate)